Il y a quelques temps (septembre 2022), j'ai glané un vieux tour à bois pour une centaine d'euros, sans certitude sur son bon fonctionnement. Sans marque, monté sur deux rails avec un entre-pointes phénoménal, une belle hauteur sous pointe (diamètre max de plus 40cm) et avec un moteur triphasé en bon état théorique, il m'a semblé offrir du potentiel et c'est ce qui correspondait à mon budget pour débuter le tournage (hors gouges et cie...).
Bien sale, un peu rouillé, j'ai commencé par le nettoyer et tester le moteur en le branchant sur le variateur de ma scie à ruban, ça tourne ! Il a fallu ensuite tourner une poulie en bois sur l'arbre de la poupée fixe, et une autre sur l'arbre moteur, car initialement le tour était entrainé par une courroie en cuir en piteux état.
En l'état, avec un nouveau variateur dédié, c'est pas mal. Il y a malgré tout un hic : impossible de retirer la griffe d'entrainement de l'arbre de la poupée fixe et je ne peux donc pas utiliser de mandrin. Il faudra que j'aille voir un tourneur métal pour résoudre ce problème...
Les paliers sont graissés et ont tendance à projeter de l'huile / graisse assez loin ! J'ai donc bricolé un carter en bois et zinc pour contenir ces projections...
Le porte outil s'est avéré joli mais pas pratique, sans réglage de hauteur et un peu court (carrément ridicule vu l'entre-pointe). J'ai donc bricolé un premier "add-on" que je continue d'utiliser. Il n'est pas parfait mais fait quand même l'affaire !
Pendant un peu plus d'un an j'ai utilisé occasionnellement ce tour mais son installation fixe n'était vraiment pas idéale, encombrant un mur, sans dégagement devant la poupée fixe donc m'obligeant à devenir régulièrement gaucher (un bon exercice malgré tout). Aussi, avec l'idée de réaliser une ponceuse calibreuse sur ce tour, il me fallait un dégagement à l'arrière.
Il était donc temps d'envisager de lui bâtir un support mobile. Rien de "fancy", quasi 100% de récup : pin de construction, contreplaqué de la caisse de livraison de la rabot/dégau, assemblages rapides à mi-bois, deux coups de disqueuse sur les rails et mes premières soudures avec le petit poste fil fourré Parkside.
Le tout est quand même assez lourd et difficile à bouger, trainer... J'ai donc ajouté quatre roulettes escamotables à 40€ (Vevor, pas ouf) pour enfin lui trouver une place plus adaptée dans l'atelier.
Petit lapidaire
Un premier module que j'avais fait assez rapidement après la remise en service, plutôt efficace mais pas très pratique côté aspiration. Maintenant que j'ai un vrai aspirateur à copeaux il était logique de le connecter, grâce à une pièce toute simple imprimée en 3D.
Ponceuse calibreuse
En fait, c'est surtout pour ça que j'ai bougé le tour ! Je voulais m'essayer au lamellé-collé et au cintrage mais pour ça, il me fallait de quoi calibrer des fines épaisseurs, chose délicate voir impossible avec la raboteuse.
Ce module est constitué de trois parties :
- un cylindre de 15cm de diamètre pris entre la poupée fixe et la pointe de centrage à roulement de la poupée mobile, avec un ruban d'abranet 80 enroulé dessus.
- une table inclinable, avec une charnière à piano et un système tout bête et classique sur une tige filetée, un disque en bois avec un insert pour régler la hauteur et un papillon sous la table pour verrouiller.
- un capot de protection et d'aspiration, avec un autre raccord imprimé 3D, comme sur le lapidaire.
Le cylindre est fait avec des disques en MDF dégrossis à la scie à ruban, un axe en érable de 12mm. Il est ensuite calibré avec une cale et de l'abrasif passés sur la table pour poncer le rouleau, jusqu'à obtenir une surface lisse et régulière.
L'abrasif enroulé sur le cylindre est tenu par une vis et une rondelle de chaque côté mais j'envisage de faire un truc plus propre avec des coins en bois vissés.
C'est plutôt concluant ! Au départ pour tester j'ai utilisé de l'abranet 120 que j'avais en rouleau mais ça chauffe et s'use assez vite, c'est un peu laborieux. J'ai donc acheté un rouleau de grain 80 et ça va nettement mieux, plus vite, en s'usant moins. Il faut adapter la vitesse de rotation en conséquence.
Le processus est assez simple :
- dégauchissage sur au moins deux faces perpendiculaires,
- refente à la scie à ruban d'une première lame,
- à nouveau dégauchissage,
- refente d'une deuxième lame,
- etc, autant de fois que nécessaire et qu'il y a du bois !
- passages des lames à la calibreuse avec la face de référence dégauchie sur la table pour poncer les traces de scie et mise à l'épaisseur.
Après quelques essais et vu le matériel dont je dispose, je dois pouvoir réaliser des placages de 30cm de large et moins d'un millimètre d'épaisseur.
Pour tester la calibreuse, j'ai démarrer un petit projet de lampe de chevet en noyer et frêne :
N'hésitez pas à me faire des suggestions d'amélioration ou d'autres modules que je pourrais adapter sur ce vieux tour rustique, qui ne brille pas par sa précision mais qui ne m'aura pas coûté très cher et me permet de faire déjà pas mal de choses (sauf le tournage en l'air en sécurité car pas de mandrin, au mieux une plaque comme pour le lapidaire).
Discussions
Un sacré beau travail, chapeau.
Merci christianjacques !
Je vais étudier ta sphéreuse et ta lunette de tournage
C'est vraiment satifaisant de se faire ses propres outils.
J applaudis votre ingeniosité , beau moteur ( mieux que mon premier tour qui avait un moteur de machine a laver).J espère voir votre lampe finie.
Haha ! En fait mon tout premier tour était un recyclage d'une ponceuse lapidaire de m**** mais ça calait tout le temps, du coup j'ai pris un truc plus costaud
Je vois que tu travaille "sous vide" ! Un jour je fabriquerais mes skis
La lampe n'a pas encore pris forme, il reste encore un collage à faire, mon gabarit ne permet qu'un collage à la fois... Mais si je foire pas ça pourrait ressembler à ça :
Ca promet d être sympa
La voilà terminée !
Quel travail ! Et belle inventivité aussi. Le tour est trop beau!
Du travail, oui et non, c'est surtout du loisir
Oui il est beau et je me demande s'il n'est pas d'une fabrication artisanale, assez ancienne...
belles réflexions, a ce rythme tu vas vite avoir un parc machines dès plus complet
Petit-à-petit, l'oiseau fait son nid
Il manque une toupie ou une bonne défonceuse sous table mais le budget et l'espace sont serrés... La petite affleureuse Makita et mes rabots manuels sauvent la mise pour l'instant.
Hello Airdrien,
Super boulot j’adore !
Cordialement.
RL.
Merci !
Les projections d'huile ne seraient-elles pas dues à une vitesse de rotation bien plus élevée que celle d'origine ?
De même pour le porte outil, qui doit correspondre à un travail sur gros diamètre fini?
C'est très possible ! Avec le variateur je monte rarement dans les tours et je pourrais ainsi revoir le diamètre de mes poulies et peut-être gagner en couple.
Merci pour cette observation très pertinente.
Ah oui aussi : il y a une butée en bout d'arbre réglable avec une vis écrou et contre-écrou en frottement métal su métal. Autant que possible je ne la sollicite pas pour tourner entre pointes mais en l'air c'est presque obligatoire si ça ballote, sûrement un autre indice sur l'usage initial de ce tour.
Il était dans un coin d'un ancien atelier de menuisier. Je suppose qu'il a vu quelques pieds de table !
Je pensais à de plus gros diamètres que ceux de pieds de table. Par exemple des fûts d'escaliers peut être, ou des colonnes ...
Bravo !
Petit rappel (si j'ai bien vu...) : les courroies trapézoïdales ne doivent pas toucher le fond de gorge, juste les flancs. Mais maintenant que tu as un beau tour, ça doit être facile de les refaire !
Merci, tu fais bien de me le dire et je vais vérifier. J'en profiterai pour revoir les diamètres.
beau résultat!ces machines à coussinets , toute une époque!
Je ne connaissais pas le terme, tu parles des paliers ? Du bronze il paraît?
Des paliers en bronze oui, c'était avant l'invention des roulements à billes.
Le bois de gaïac, ou bois de fer, a aussi été utilisé comme palier pour les arbres de couche (arbre d'hélice) au début de la vapeur.
A propos Airdrien, j'avais omis de dire comme je trouve ton porte-outil très joli. Pour un débutant tu fais pas mal!
christianjacques merci pour ces infos historiques et ravi que tu trouves ce porte-outil joli. Je débute mais je progresse
christianjacques En Europe le précurseur du roulement a bille était le palier en Bronze , aux États Unis c était le "babbitt bearing" qui est un alliage d étain . J ai des collègues qui ont encore des machines avec ce genre de "roulement" ,intéressant a voir surtout quand il faut les recouler.
Belle info
Bonjour normandie, voici deux pages Wikipedia qui prolongent le propos:
en.wikipedia.o...Babbitt_(alloy),
fr.wikipedia.org/wiki/Régule#,
Comme quoi un vieux tour reconditionné peut mener loin!
christianjacques merci , j ai un collègue dans l Oregon dont tout l atelier est equipé de machines de cette époque , il fait de la fenêtre traditionnelle (a guillotine biensûr)
son instagram :monitormillwork
Belle bête et superbe évolution
Pour des infos sur ce type de tour, tu peux t'adresser à Claude BONDET qui en connaît un sacré rayon sur l'histoire du tournage et de ses outils : www.leboistourne.fr
Merci, je vais peut-être le contacter.
Le porte outils ressemble furieusement à une machoire d'étau avec un mors modifié plus large.
Ah oui c'est vrai ! Ce n'était pas voulu, je me suis juste attardé sur la sculpture même si ce n'était pas nécessaire... C'était juste plaisant
beaucoup de travail mais très beau résultat
pas tant que ça finalement mais ça valait le coût et puis ça fait partie du plaisir.