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Ara

Ma première commande !

Ma première commande !
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Première commande d'un copain, pour un meuble pour sa platine vinyles.

Il me montre quelques photos d'un catalogue, je lui fais des plans, il vient voir quelques chutes pour choisir l'essence et la finition, et après quelques soirées entre Sketchup et de nombreux échanges de mails, l'ensemble est défini :

  • Frêne olivier
  • Épaisseur 40
  • Fond en isorel pour cacher la filerie
  • Pas de pieds (seront choisis plus tard)
  • Pas de porte, pas de tiroirs, pas de quincaillerie, ça me va bien !

Finalement il n'y a que 5 planches, j'estime cela à une bonne journée de boulot, une centaine d'euros de bois, je fais un devis, et c'est parti.

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Obtenir les planches

Première étape bien sûr, aller chercher le bois. Dans une scierie. Du frêne olivier, pas facile à trouver... mais on trouve. Deux beaux plateaux, 60 kg chacun... J'ai fait une photo pour lui montrer ses planches à lui, et une planche "normale" :

Alors pour la "bonne journée de boulot", quand on sait que, porte à porte, il faut déjà 3 heures pour aller chercher les planches, évidemment on se doute que ça va dépasser !

Ensuite passer un coup de rabot pour savoir à quoi s'en tenir et commencer à choisir où l'on va couper. Moi qui n'ai jamais tenu un rabot de ma vie, j'ai à la fois le sentiment de devenir un "vrai menuisier", et à la fois d'être un imposteur...

S'en suit le débit et un "pré-corroyage" à 45 mm, qui permettra aux planches de stabiliser leur hygrométrie dans le salon. Comme tous les dessus de meubles sont déjà occupés et que l'acceptation sociale commence à être difficile, j'ai trouvé une nouvelle planque : sous le canapé !

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Corroyage et collage

Jusque là, ça prend plus de temps que prévu mais ça marche bien. Ensuite le corroyage définitif, quelques difficultés à perpendiculariser mon guide, mais quand on arrive à ceci, ça devient acceptable !

(bon, c'est peut-être même un peu excessif, hein, après on se demande pourquoi j'y passe tant de temps !)

Ensuite j'ai pris le temps de faire une presse à panneaux...

...mais qui n'est pas si pratique que cela. Des serre-joints dormants auraient été plus faciles d'utilisation, mais plus compliqués à fabriquer.

Le collage, eh bien, a sans doute un poil manqué de colle... mais on y reviendra !

Et puis un coup de racloir pour enlever le journal collé, là encore c'est comme pour le rabot : un "vrai" geste de "vrai menuisier", et toujours cette impression d'imposture !

Puis vient le grand plaisir du projet : utiliser pour la première fois, "pour de bon", cette fameuse ponceuse-calibreuse.

Et quand à la première passe (en grain 120), on obtient ceci :

Je peux vous dire qu'il y a de quoi faire un bon gros [avec la voix de Jean-Pierre Marielle] Ah nom de Dieu de bordel de merde !

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Ensuite vinrent les ennuis...

Jusque là, je buvais mon petit-lait ! Ensuite...

Il a fallu couper les plateaux. Or, ce qui n'aurait pris que 10 minutes pour qui a une scie à format, ou même simplement une bonne machine portative avec son rail magique, m'a pris 3 heures.

Méthode n°1 : utiliser la Lurem, avec le chariot pris à revers. Oui je suis un peu naïf, mais j'avais le vague souvenir d'une photo dans le manuel avec un type tout souriant, bien coiffé, pas un copeau sur la manche, qui coupe un panneau en utilisant le chariot à l'envers (on devrait toujours se méfier des sourires commerciaux) !

Bref, j'ai tenté, et le résultat est, comment résumer en un mot ? Une catastrophe, non ?

Le souci étant entre autres qu'on ne peut pas serrer le panneau pendant la coupe, donc il risque de glisser.

Plan B, ma méthode de coupe de panneaux du pauvre...

Un peu longue à mettre en œuvre (dégager tout le bazar sur le plateau, sortir les cales, le matériel, les serre-joints tout le bintz...), mais efficace ! Du moins c'est ce que je croyais !

(vous noterez la petite cale martyr pour éviter les éclats en fin de coupe).

Résultat : c'est droit, mais les chants font un angle énorme avec les faces, impossible de comprendre pourquoi (la scie est pourtant bien verticale).

Plan C, retour à la Lurem, et après quelques essais j'ai compris que c'était la butée de la règle du chariot qui était mal réglée (et pourtant la dernière fois que je l'avais réglée, elle était bien !!).

J'ai donc fini par arriver à faire mes coupes droites, mais à quel prix...

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Et puis, les vrais ennuis !

Bon, quand on en est là, on voit le bout du tunnel, non ? Plus qu'à lameller et coller (avec ma presse, qui plus est), oui, yapuka !

(en même temps, je sais très bien que l'enfer c'est le collage) (oui, hein, "l'enfer c'est les autres", qu'il disait, si Sartre avait été menuisier il aurait su que l'enfer c'était le collage).

Alors quand c'est bien il faut le dire : le lamellage s'est bien passé, c'est-à-dire que je n'ai pas fait l'erreur qui tue et qui oblige à refaire complètement un panneau (oui oui, que celui à qui ce n'est jamais arrivé de faire une entaille du mauvais côté me jette la première pierre, hein). Il faut dire que j'ai mis des marques partout et que j'ai contrôlé 20 fois tellement c'est simple (de se gourer).

Et enfin, le Grand Moment Que Nous Attendons Tous : l'Épreuve de la Colle !

  • Assemblage à blanc d'abord (rien n'est laissé au hasard) : ça s'assemble, CHECK !

  • Étaler la colle avec le poignet souple mais ferme, et selon un subtil dosage (un peu plus que la dernière fois), CHECK !

  • Ensuite on assemble l’œuvre (que dis-je : l'OEUVRE !) sur la presse préparée où tout avait été anticipé : SUPER-CHECK !

On y croit, là, non ? Où c'est que ça va merder finalement ?

On commence le serrage, bon, avant de checker on s'y reprend à plusieurs fois, mais ça marche, hein, ça marche, on y croit encore, et ça dégueule un poil mais pas trop, franchement, on est fier de son dosage, hein, ha ha, on se dit qu'on va conjurer le sort, et que pour une fois dans sa misérable vie, PUTAIN UNE FOIS DANS SA VIE ! on va faire un collage qui marche bien du premier coup !

Et pis...

Alors ?

Non, rien. Ça a marché.

(vraiment ?)

Doute...

Ben si, c'est bon.

Presque déçu...

Nan, passke, le coup du rabot, le coup du racloir, le sentiment d'imposture, quoi... et là un collage qui marche du premier coup ? Un peu trop facile, non ? Si c'est ça alors vraiment, je m'auto-proclame "vrai" menuisier, hein... mais une obscure superstition réprime toute envie de crier trop vite victoire...

Mais non, vraiment rien à redire. Je range le matos, je rends mon tablier, je suis prêt à éteindre la lumière, je refais un petit tour au cas où, et là, une toute petite ombre attire mon regard...

Coup dur ! Au moins 1,5 mm de désaffleur côté face visible, ça c'est dur ! Un vrai menuisier saurait faire avec (un bon coup de rabot bien placé au "démoulage", et il n'y paraîtrait plus). Mais moi...

Je tente quelques coups de massette sans trop y croire, je desserre et recommence, rien à faire. Au passage, je vois en faisant le tour qu'une cale est mal mise... donc là il n'y a plus de doute : il faut desserrer, démonter, remettre la chose "d’équerre", remonter, resserrer, bref, tout recommencer, sachant qu'à ce moment-là il est 22h, et coup de grâce :

Un des collages du flanc a lâché, sans doute à cause de mes coups de massette, et incontestablement parce que j'avais mis trop peu de colle la première fois.

Il y a des fois où l'on aurait mieux fait de se coucher... et même là tout de suite on voudrait y aller... ben on peut pas !

Je vous fais grâce de la suite et du temps que j'y ai passé, je peux juste dire que je n'ai pas recollé le flanc, j'ai fait avec. Par contre le désaffleur, oui, je l'ai réaffleuré.

Enfin au "démoulage", entre les planches qui ont peut-être un peu travaillé, et le fait qu'avec mes 4 faux serre-joints dormants je n'ai pas pu serrer au milieu des panneaux, les flancs se sont tuilés, et pas qu'un peu... sur la photo suivante, la règle touche au milieu du panneau :

"Vrai menuisier", ha ha ! Ce n'est pas un métier pour moi... il faut que ça reste un loisir, et un plaisir !

Pour ce coup-là, je ne dis pas comment j'ai fait pour rattraper le coup (je n'en suis pas fier !), mais disons que ça ne se voit plus, c'est le principal.

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Les finitions

Le "client" était séduit par l'huile de lin, ça a le mérite d'être facile à poser, peu coûteux, et ça révèle bien le coeur du frêne-olivier. Au final, ça a quand même plus jauni que je ne pensais.

Pour les dosages j'ai fait 50% huile + 50% térébenthine + un peu de siccatif ; pour la deuxième couche, j'ai pris le fond du mélange et j'ai ajouté de l'huile de lin + du siccatif, et pour la troisième quelque chose comme 90% d'huile et 10% de térébenthine, avec un peu plus de siccatif. Et 24h entre chaque couche.

Et pour boucher le trou d'un nœud vraiment trop inélégant, et quelques jointures mal faites entre certaines planches, j'ai fait une pâte à bois maison avec la méthode de Copeaux d'aronde (grand merci !) trouvée ici : utiliser le produit de finition comme liant (et surtout pas de la colle vinylique qui noircit affreusement). Avec l'huile de lin je ne suis pas sûr que ça se solidifie un jour, mais si on ne gratte pas ça fait le job.

Dernier séchage dans mon salon, là on y est au bout du tunnel, non ?

Et pour le fond en isorel, il fait [hauteur bas / étagère] + 10 mm, la planche du bas a un rainure de 5mm et celle du haut de 10 mm. On l'a mis en place lors de la livraison, et si besoin c'est démontable.

Hé hé ! Colis livré !

(et là, y'm dit "au fait, à l'occaz, il faudra qu'on parle d'une table de salle à manger")

Ahhhhhh !

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Avec les pieds

Juste une petite photo du meuble une fois vraiment terminé, avec les pieds trouvés et installés par le "client".

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Discussions

Ara  a publié le pas à pas "Ma première commande !".
il y a 3 ans
Goulipao
( Modifié )

Que d’aventures! Mais tout est bien qui finit bien! Et comme tu dis, on ne s’improvise pas menuisier, mais c’est un beau loisir!
(Hâte de voir la table pour la salle à manger de ton ami! 😄)

Ara

Ne m'en parle pas ! Je l'ai prévenu que pour la table ce ne serait pas avant un an ou deux, mais j'ai déjà commencé à faire des plans... qui restent dans le même style : très carré, très anguleux et en 40 mm, mais moins massif, plus épuré, bien plus léger... mais mécaniquement impossible !

J'adore me mettre tout seul dans le pétrin !

denisjl
( Modifié )

Merci pour cette épopée 😃

Ara

Avec plaisir, denisjl, mes galères sont les vôtres !

Petit détail que j'ai oublié d'évoquer, mais qui aurait pu être un running gag du récit : sur les 120 kg de planches de départ, il n'en reste que 52 dans le meuble. Et bin 52 kg, c'est louuurd ! Et encore, la montée des 4 étages par les escaliers n'a pas été le plus dur : c'est plutôt la manipulation constante des plateaux de 15 kg dans l'atelier... Quelle idée de faire des trucs aussi lourds !

Jean Galmot
( Modifié )

Cool, le métier rentre, le Maire de Pont-Aven serait fier de toi😁.

Ara
( Modifié )

Je vois que Monsieur Jean Galmot a des références culturelles ! Mais aujourd'hui je n'ai pas osé remettre la photo que j'avais déjà utilisée ici (la 8ème à partir du début) :

Jean Galmot
LionelDraghi
( Modifié )

Ah bien sûr! j'avais raté la référence!
Merci pour le rappel dans ton article d'il y a six mois. En voyant les photos à l'époque, j'avais l'impression d'entendre la voix de Marielle, j'en rigolais tout seul! :-)
Du coup, je suis retourner voir la scène complète, 4 minutes de rigolade!
Merci à toi! :-)

Et pour ton meuble : "Aaahhhh mon Dieu, quelle Merveille!" :-) :-)

mmahieu
( Modifié )

Super résultat malgré les petites galères
Merci pour ton retour d'expérience sur les éteignoirs, faudra que je pense à serrer l'ensemble en travers avec deux gros chevrons plus serre-joints à pompe, histoire de limiter le tuilage. A moins que ce ne soit un très léger défaut de corroyage, et que par malchance toutes les planches étaient dans le même sens et non alternées, d'où le cumul des défauts et non leur compensation ?
👍

Ara

mmahieu un "très léger défaut de corroyage" de 5 mm, tu plaisantes ? S'il y a 1/10ème d'écart je recommence tout à partir de l'abattage de l'arbre !

Non sérieusement c'est parce que j'ai serré uniquement sur les côtés, et qu'en plus il faut être clair : le système de serrage avec des coins est bien moins efficace qu'un système à vis. Les flancs n'avaient donc simplement pas pris leur place.

D'ailleurs je suis dans le quartier et faux quartier, donc l'alternance n'avait pas un impact considérable.

Boulou
( Modifié )

Ça y est, tu est parti pour de bon maintenant, car ton ami doit être content, il te demande une table ( table rivière a la mode avec de la chance) en tout cas ton récit est marrant et vraiment comment dire réaliste parce qu'on cache beaucoup nos défauts dans nos présentations ( moi le premier) a moins qu'il y est des mister perfect

Ara

Merci Boulou ! Pas que je sois de mauvais esprit à en être content, mais je me sens moins seul !

glaude
( Modifié )

la belle satisfaction qui fait oublier tout le reste, c'est la satisfaction du nouveau propriétaire!
le reste va venir bonne chance

Ara

Yep glaude, heureusement qu'il y a ça parce que s'il n'y avait que mes 3 euros de l'heure...

glaude

Ara
Rassures toi, cela aurais pu être moins!!!!
çà va aller, et comme disais un certain J.... on y croit et on s'accroche

Kentaro
( Modifié )

Oui, mais un meuble hihi, cela doit ressembler à un billot de boucher... 😇

A refaire !

Ara

🤔 Qu'a-t-il voulu dire ? Dis Kentaro, tu n'aurais forcé sur la térébenthine ces temps-ci ? 🙃

Kentaro

Ara Thérébenthine ? moi, jamais!

C'était en référence à une autre discussion sur un meuble hifi:

Ara

Kentaro celui de Robin ressemble plus à une sauterelle qu'à un massif billot de boucher je trouve (c'est pour cela que je n'avais pas fait le lien). Mais en tout cas comparé au sien je ne peux pas lutter !

cocoM
( Modifié )

Un gros merci pour ta plume et l'humour.
Pour ce qui est du sentiment d'imposture, sans vouloir t'inquiéter je pense que dans la vie il y a deux catégories de personnes : ceux qui l'ont et ceux qui l'ont pas, toi tu l'as. Si tu es comme moi, dès que tu feras quelque chose de nouveau, même si c'est du nouveau qui utilise les recettes que tu as appliqué des centaines de fois, tu auras toujours cette impression.

Reste à trouver comment faire des ce sentiment une force dans ton travail : moi ça me sert en amont du chantier pour savoir dire stop quand les demandes des clients rajoutent trop de difficultés, pour finalement les rappeler deux jours plus tard en hurlant "good news everyone !, j'ai trouvé comment faire". Ca donne aux clients le sentiment que tu t'attache vraiment à leur projet, et ça peut faire le petit point affectif qui manquait pour que le devis soit signé.
Et après pendant le chantier, c'est ce sentiment qui m'oblige à vérifier mes équerrage plus que de raison, tester 15 combinaisons possibles pour la composition d'un panneau avant de le coller... bref faire tout un tas de petits gestes inutiles mais qui à la fin se transforment en détails qui rendent fière.

Ara
( Modifié )

Eh oui, cocoM, reste que les vrais pros ne peuvent pas se permettre de vérifier 20 fois avant de couper, de perdre trois heures sur une découpe et de viser le 10ème de millimètre en permanence, et c'est pour cela qu'on ne joue pas dans la même cour (un bon patron m'aurait mis dehors !). Comme dit mon père : "le trop est l'ennemi du bien" !

cocoM

Ara bin... chuis pas d'accord.
Certes le monde moderne nous dit qu'un vrai pro n'as pas le temps, qu'il doit être rentable, etc etc. Mais pourtant je connais un paquet de pros qui embauchent pour laisser les salariés faire la partie rendement, et qui eux se gardent la crème du boulot et prennent bien leur temps pour sentir la matière etc...
Ce qui fait de toi un pro, c'est que ton travail se démarque de celui d'un amateur, soit par son efficacité, soit par sa qualité, et que tu vas donc avoir un argument qui incite un acheteur potentiel à acheter tes services.

Perso j'ai choisis la micro-entreprise pour pouvoir m'affranchir de cette course au rendement, en faisant le choix de raboter au maximum les coûts fixes (il me reste l'assurance, l'élec, le loyer, l'eau je n'ai que la consommation à payer et pas d'abonnement). Résultat, si un mois je ne fais pas de chiffre d'affaire, c'est soit que j'ai bossé pour faire du chiffre le mois suivant et tout va bien, soit que je n'ai pas bossé et dans ce cas là je n'ai rien dépensé. Si je suis à peu près le tarif des voisins menuisiers, même en prenant le temps de faire mes petites maniaqueries je gagne largement mes 20€net de l'heure travaillée... même en bossant dimanche et jours fériés je n'ai jamais touché autant en tant que salarié, donc mon train de vie s'accommode très très bien de ce taux.

Et puis globalement, avec l'habitude j'arrive à rendre ce côté tatillon relativement peu impactant sur la vitesse de travail : le temps passé à faire mon établissement est certes long, mais j'en rattrape un bonne partie sur la finition puisque j'ai eu le temps de voir les défauts de chaque pièce, de les placer judicieusement pour ne pas avoir de travail dégueu à l'usinage...

trente six seb

+1 avec cocoM, il n'y a pas de vrais pros ou de faux pros.
Un pro c'est quelqu'un qui en fait son métier et qui donc vit de ce métier.
Ça ne présume pas d'un niveau quelconque (Mais d'un minimum vu que le cap est requis, du moins en menuiserie).
Et j'ai choisi l'EI exactement pour les mêmes raisons que cocoM a choisi la micro : avoir le moins de charges fixes possibles.

Ara

cocoM et trente six seb si vous êtes à 20 euros de l'heure, vous êtes infiniment plus rapides que moi !

(mais n'ayons pas d'inquiétude : mon projet d'avenir n'est pas d'être menuisier, alors si je fais un truc qui me rapporte de l'argent de poche une fois par an ce sera très bien !)

trente six seb

Non, je suis à 40 €uros de l'heure.
Mais ça ne veut pas dire qu'on bosse vite ou pas.
Le tout, c'est d'estimer au plus juste le temps qu'on va y passer où qu'on devrait y passer. Et c'est ça le plus dur en fait.

Ara

trente six seb oui c'est le débat qu'on avait eu avec Kentaro l'autre jour (quand il était question de comptabiliser les charges selon le statut juridique), mais dans mon cas et avec ma vitesse il faudrait que je vende un tel meuble 2000 euros et le copain n'en voudrait pas.

C'est pour cela que je reste dans une logique d'amateur : j'ai passé plus de temps que prévu à pratiquer un loisir, le "client" est content et du coup moi aussi, et accessoirement ça m'a ramené de l'argent de poche. Toi c'est une activité de laquelle tu vas devoir vivre, c'est une tout autre logique.

trente six seb

Oui mais je facture le temps que j'estime devoir y passer, pas le temps que je vais y passer réellement. Le client en peut pas payer 2 fois plus cher parce que je suis 2 fois plus lent. ^^

Pour le prix de 40 €uros, je me suis mis à un tarif plus élevé que la plupart des jeunes installés mais largement en dessous des déjà installés. Et puis je ne suis aps soumis à TVA, il faut donc comparer mes 40 €uros (équivalent TTC donc) à 48, 50 ou 55 € HT.

Et ça me permet d'avoir une marge sur mes dépassements de temps et sur ce que j'oublie de compter.

cocoM

même raisonnement, mon tarif horaire facturé est de 40€ aussi, quand je parle de 20€ net c'est ce qu'il me reste charges déduites sur des projets où j'ai facturé au prix du marché (étagères) sans faire de devis détaillé.
Quand je fais un projet sur lequel je calcule vraiment mon temps de travail en amont, souvent je tombe juste sur les tâches "basiques" (corroyage, panneautage, assemblage) mais je devise toujours à minima pour les tâches nouvelles pour moi. Dernier exemple en date : un gros lamelle collé avec 6 gabarits de courbes différents, je n'en avais jamais fait, du coup j'ai estimé le temps qu'y passerait un expert, et j'ai pris mon temps pour le faire bien sans regarder la montre. Au final si je ne compte que le lamellé collé j'ai du me payer 2€ de l'H, mais sur l'ensemble du projet je suis quand même pas loin de 12€ net.
Et pour en revenir à l'élément de base, pendant que je faisait mon lamellé collé j'étais tout penaud, à tel point que je ne voulais le montrer à personne avant qu'il ne soit fini de peur d'être jugé sur ma méthode même par mes parents ou ma copine (c'est dingue la psychologie humaine). Par contre une fois fini, je suis content car c'est un des éléments qui a le plus plus à la cliente.

Ara

cocoM bon ben maintenant qu'il est fait tu peux nous le montrer ! Tu l'as publié dans L'AdB ?

trente six seb

Pareil... j'ai du mal à bosser avec du monde autour de moi... même des gens qui ne connaissent pas la différence entre un maillet et une scie à format...

dependancesbois

Super récit Ara !!!!
Bienvenu dans le monde de l'imposture et des bourdes !
Non ne t'inquiètes pas "tu n'es pas seul".
Je suis pro parce que j'en ai fait mon métier, c'est pas parce que je suis super bon et rapide que je suis pro, mais je me doit de faire au mieux que je peux PARCE QUE je suis pro.
Je rejoins totalement trente six seb et cocoM , et le truc que je ne fais surtout jamais : convertir ma facture dans le temps horaires que j'ai mis !!!!!
Je chiffre par rapport au prix que je pense être juste de payer pour la commande et pas par rapport au temps passé.
C'est à moi de me débrouiller pour que ça rentre dans ce que j'aimerais obtenir.
Y a pas de méthode unique, il faut juste que tout le monde le vive bien.
Au final le chiffre d'affaires n'est important que pour les organismes financiers, mais dans la vraie vie chacun est différent.
Quand je pense que si tout était gratuit on ne travaillerai plus pour de l'argent mais par plaisir, compétences et solidarité ! (Utopie bisounoursienne, mais j'aime bien ! 😜)

Zaina
( Modifié )

Merci Ara pour ton pas à pas de tes réussites et erreurs plein d'humour. Je me sens nettement moins seul du coup. A te lire j'ai l'impression de m'entendre quand je bosse.

Ara

Ah ben voilà on dirait qu'on est plusieurs ! Je propose qu'on fasse un collectif de boiseux nommé "les cas sociaux de la menuiserie" avec tous nos déboires !!

PierrePoulizac

+1 ! 😂

Zaina
( Modifié )

Ara

+1
Effectivement, tu n'es pas le seul. D'ailleurs je commençais à déprimer en voyant les créations postées ici. En lisant ton parcours pour cette réalisation ça m'a redonner de l'élan.

En ce qui me concerne, le "SDF de la menuiserie" pourrait me convenir.

Si le manque d'expérience est un grand frein à des belles réalisations, le manque d'outillage élémentaire l'est davantage. Par exemple : une simple scie stationnaire et une honnête rabot/dégau m'ouvriraient des perspectives inouïes. Mais pour l'heure, j'en suis à me débrouiller avec mes petites mains inexpérimentées. Mais j'en tire à chaque fois un grand plaisir. Même quand c'est un flop total.

Ara

Zaina je comprends et je suis d'accord avec toi pour l'outillage, mais finalement tu vois le matos que j'ai, un atelier de 80 m² qui fait des envieux, et pourtant je passe 3h à découper des panneaux de 45cm au lieu de 5 min si j'avais une vraie scie à format. En toute logique, je devrais donc rêver d'un atelier de 350 m² avec de l'outillage de pro...

Ça doit être relatif. Peut-être qu'en fonction de nos moyens, on vise toujours un peu trop haut. Et au fond ce n'est pas plus mal parce qu'on y arrive quand même !

Zaina

Ara

Un peu comme toi. Je vais bientôt (je l'espère) récupérer un espace de près de 100m² + étage de même surface. Mais pas d'outillage.

De toute façon, dans un premier temps je pense ne faire que du très simple : Wicking Bed, bacs à plantes, fauteuils de jardin, ... . Ce n'est pas très exigeant en matière de précision, donc ça me laisse une marge pour m'améliorer en cherchant à être plus précis. Pour ce premier pas, une scie et une rabot/dégau modestes (mais pas du Einhel siouplééééé) me serviraient pleinement. Je n'ai pas la prétention de devenir menuisier, mais plutôt de m'approcher au plus près de ses qualités.

J'ai accumulé un tas de palettes. Elles n'attendent que l'outillage pour leur insuffler une second vie. En attendant, je ronge mon frein et admire le travail des autres. Ça fait du bien de voir du beau.

mokozore
( Modifié )

En voyant ce meuble, je me dis que j'aurais bien vu de grosses queues d'aronde pour l'assemblage plateau/montants... histoire de rajouter des blagounettes potentielles!

Zaina

mokozore

Sadique !

Ara

mokozore les queues d'arondes, ce ne serait pas un truc de "vrais menuisiers", ça ? Point trop n'en faut !, dirait ma fille, il faut savoir rester à sa place ! Déjà le rabot et le racloir, je jetais des coups d'oeil à gauche et à droite pour être sûr que personne ne m'observe !

mokozore

hum, je sais pas, vrai menuisier, faux menuisier, gardien du temple... En tout cas, le bois que tu as choisi est très beau.

edouardsoum
( Modifié )

Merci pour l’épopée qu’on lit jusqu’au bout tel un bon livre.

Bravo pour ce vrai-faux (ou faux-vrai) menuisier.

Hâte de te relire.

Ara

Merci pour le compliment, edouardsoum, et en effet, vu le nombre d'heures que j'ai passées (je me refuse obstinément à diviser le montant du chèque par le nombre d'heures), il y a probablement plus d'avenir en étant écrivain que menuisier !

Jean Galmot

Ara > il y a probablement plus d'avenir en étant écrivain que menuisier

Excellent...

Ara

Jean Galmot leurs conditions sont bien pires, alors que paradoxalement leur boulot ne se délocalise pas en Chine ou en Suède... va comprendre !

Artanux
( Modifié )

Belle réalisation et belle narration, on s'y croirait!

Moi qui n'ai pas encore de telles réalisations à mon actif, j'imagine bien le sentiment d'imposteur... J'ai envie de souligner le propos de cocoM en disant que c'est ça aussi qui fait avancer. Parce que ça oblige à se poser des questions et c'est vital pour avancer.😉

Ara

Merci Artanux, c'était surtout l'impression de "jouer dans la cour des grands" sans y avoir été invité. Mais aussi la petite fierté de ne pas s'être fait gauler et renvoyer dans l'autre cour...

Artanux

Mince, on m'avait pas dit qu'il fallait une invitation? 😁

trente six seb
( Modifié )

C'est bien raconté !
Je crois qu'on l'a tous vécu et ça revient à chaque fois que je prends trop d'assurance !
Mais c'est aussi de l'expérience et c'est ce qui fait avancer. Mais sur le coup, c'est toujours rageant de penser avoir réussi quelque chose "pourtant simple" et finalement de s'apercevoir que ben non, c'est loupé...
Et la pression n'est pas la même quand on travaille pour soi ou pour d'autres.

Ara

trente six seb

Mais c'est aussi de l'expérience et c'est ce qui fait avancer.

Sauf le collage ! La malédiction du collage, c'est Sisyphe...

trente six seb

Tu as essayé la colle lente ??
(le supplice dure plus longtemps 😁)

Gliron
( Modifié )

Un plaisir de te lire! Et quand on sait que chaque nouvelle réalisation est une première fois, cela laisse augurer d'agréables lectures...

Ara

Merci Gliron ! Si tu veux de la lecture tu peux aller voir mes plans, il doit y en avoir un ou deux du même genre...

Gliron

Oui, je n'y ai pas manqué, et certains m'intéressent bien. Merci!

tab999
( Modifié )

beau récit, merci !
tu n'es pas "imposteur" : tu es petit menuisier parmi les grands 😉

Ara

Merci tab999 !

MOWD
( Modifié )

Ton imposture me fait penser à un copain qui m'a commandé le bénitier pour sa paroisse. Je n'avais jamais fait de lamellé collé, ni de "commande" autre que pour la famille. Quand il me l'a payé, j'avais l'impression d'être un imposteur parce que j'y voyais plein de défauts... mais lui l'a trouvé top, et la paroisse aussi.
Alors qu'importe: si le client est satisfait, c'est que le travail le valait. Il suffira de faire encore mieux la prochaine fois...

Ara
( Modifié )

MOWD tu t'es fait payer pour un bénitier ? Moi à ta place j'aurais fait un arrangement à l'amiable : je vous fais le bénitier et en échange j'ai le droit de venir faire mes prières gratos !

Sympa ton lamellé-collé en noyer !

MOWD
( Modifié )

Ara lol. Je n'avais rien demandé du tout. Ils avaient prévu un budget.
J'ai donné les coûts de matière première (colle, bol en cuivre, mdf du gabarit puisque le noyer m'avait été donné), ça représentait 40% du budget. ils m'ont donné ce qui était prévu. Ca fait pas cher la main d'oeuvre mais en même temps je le faisais plus pour le challenge de la forme qu'autre chose.
Et au passage, les prières c'est toujours gratos.

JBRosset

Merci pour ton témoignage plein d'humour et d'humilité.
Il faudrait le faire lire à plein de gens qui s'imaginent avec candeur que c'est simple, qu'un truc qui prend des jours de travail se fait en quelques heures, ou qui au contraire voient des difficultés sur des trucs assez anodins finalement quand on a un équipement correct (même d'amateur).

Ara  a publié l'article "Avec les pieds".
il y a 3 ans
glaude
( Modifié )

Tu as l'honnêteté de dire ce que chacun d'entre nous a pensé, vécu et en cela tu mérites le respect.
La complexité du projet est proportionnel à l'acquisition de tes compétences, alors il y a encore quelques gouttes de sueur en perspective !!!
L'humilité est une valeur sure, n'en doute pas.

Ara

Merci glaude, et il semblerait que le collage soit un vrai problème pour presque tout le monde... je me sens moins seul !

Santé !
( Modifié )

Et la table alors ? :D

Ara

Hum, il m'en a reparlé, j'ai fait semblant de ne pas entendre ! J'exagère parce que bien sûr je vais la lui faire, mais cette année je vais préparer mon CAP plombier, et je vais en profiter pour apprendre à souder à l'arc. Cela devrait m'ouvrir plein de nouvelles perspectives pour la menuiserie : quand tu deviens capable de faire tenir des pieds de tables avec une bonne équerre métallique bien placée, tu peux te permettre des projets esthétiques beaucoup plus légers qui sont impossibles à faire tout en bois. Affaire à suivre, donc !

qperroit
( Modifié )

Merci (avec un peu de retard) pour ce partage ! Quelle aventure, bien rédigée on lit jusqu'au bout, ça fait un peu roman policier qui tient en haleine ;-)

Ara

Merci qperroit !

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