Le meuble vient de l'arrière grand mère de la femme d'un collègue. Estimation approximative, milieu 19° siècle.
Fabrication entièrement manuelle.
Il a été stocké dans une cabane de jardin pendant des années (la mode était au "formica") et en a beaucoup souffert. Les petites bêtes l'ont bien attaqué et les panneaux ont souffert de diverses tentatives de remise en ordre pas toujours réussies.
Objectif : Refaire le dessus qui était irrécupérable et remettre le reste en état.
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Etat des lieux
Diagnostic de départ : C'est grave docteur ?
Pas mal oui...
La vrillette a bien fait son travail. Les pieds et les moulures en partie basse sont très attaquées. En le transportant à l'atelier, une partie m'est restée dans les mains sous forme de poudre.
Le plateau du dessus est trop abimé pour faire des réparations (surtout qu'il y en a déjà eu trop), il faudra le changer.
A l'intérieur un magnifique papier plastique collant vient agrémenter le tout.
Premiers soins
Pour les insectes, pas de pitié: Je badigeonne un produit insecticide partout (xylophène spécial restauration)
Sur le bidon c'est garantie 25 ans. La vrillette devrait se calmer un peu.
Ensuite, j'ai imbibé les parties fragilisées avec un durcisseur spécial rénovation. Le produit est très fluide et imprègne les fibres du bois restantes. Elles sont beaucoup plus solides qu'avant, et on peut faire la finition que l'on veut par dessus (marque lubéron). Attention ça ne refait pas le bois en poudre
Avec l'aide du décapeur thermique, j'ai enlevé le superbe revêtement floral.
Dessous, on trouve une tablette centrale en chêne, des portes en bois et un fond de meuble en chêne aussi.
Le meuble est fait de plusieurs essences:
Les parties visibles sont en merisier
La structure de l'arrière et du dessous est en chêne. Traitée très "rustique". Pas de rabotage ou presque
Le fond et la tablette sont en chêne aussi.
Les panneaux arrières sont au choix en : Chêne, sapin, peuplier?, autre que je n'ai pas reconnu. Donc tout ce qui venait apparemment.
Les tiroirs sont en peuplier (sauf les façades en merisier)
Un fois décrassé et poncé, on obtient des parties récupérables et qui gardent le charme de leurs années.
Les portes et le plateau
Les panneaux de portes étaient assez fendus pour voir à travers. De la "pâte-cire-colle" avait été mise pour tenter de boucher mais ce n'était pas très heureux.
Opérations effectuées:
Décapage, suppression des "mastics" inutiles et ... un temps de réflexion pour savoir comment réparer.
Solution que j'ai trouvé (dites moi si vous en avez une autre). Je me suis servi de la mise au mollet en contre-parement pour resserrer les panneaux après avoir encollé les fentes. Le montage fait un peu bricolo, mais c'est efficace. Les deux ciseaux sont maintenus écartés par une cale + scotch. Le serre joint vient serrer le tout au ras du panneau. On nettoie la colle aussitôt, on ponce un peu sur la colle fraiche pour égaliser les couleurs et ça marche !
Après avoir trouvé du merisier sec (pas si évident), je vous passe les débits et corroyage sans intérêt.
Collage des morceaux à plat joint et serrage 24 heures.
J'ai commencé à raboter à la main pour enlever la colle en trop et remettre à plat.
Le panneau a eu l'audace de voiler un peu malgré mes précautions : Serre joints dormants, bridage du collage à plat pour ne pas qu'il voile justement etc...
Le rabotage à la main c'est marrant mais c'est fatigant. Alors je suis passé à l'atelier du boulot et je me suis servi de la raboteuse locale : 630 mm de large, ça passe tout d'un coup !
Retour chez moi et collage des alèses en rainure-languette sur les deux bouts.
Le résultat est plutôt réussi.
Découpe des coins en arrondi à la scie sauteuse, moulurage du congé à la défonceuses et ponçage du tout.
La fixation sur le meuble est faite par chevillage collé (chevilles en chêne). En remplacement des clous d'origine.
La finition
Comme vous l'avez remarqué les parties neuves et les anciennes tranchent pas mal.
Donc, grosse étape de mise en teinte et de finition.
Passage de toutes les surfaces à la laine d'acier pour éliminer les restes de cire et essayer d'uniformiser les fonds.
Première passe de teinte partout pour avoir une base.
Le dessus a reçu 4 passes de teinte pour essayer de se rapprocher de la couleur du reste du meuble.
Ensuite, une cire liquide teintée merisier (lubéron) une fois partout, et 3 fois sur le dessus.
Au final, les couleurs ne sont pas toutes égales, mais je ne pouvais pas faire mieux. Mon collègue va sûrement recirer plusieurs fois pour continuer à égaliser la teinte. La patine et le soleil feront aussi leur travail avec le temps.
Point positifs :
C'est intéressant de retrouver la façon dont a été fabriqué un meuble. En allant "fouiller" dans les assemblages et sous les couches de finition on retrouve les gestes du menuisier qui a travaillé sur ces morceaux de bois il y à au moins 150 ans. Par endroits j'ai retrouvé les signes d'établissement et les traits de pointe à tracer qui étaient encore là.
Mon collègue a retrouvé un meuble de famille en meilleur état et il va probablement le donner à ses enfants. Le témoin continuera de passer.
Petit point négatif:
Quand vous mettez un meuble en teinte, n'attendez pas le milieu du travail pour mettre des gants : ça tâche !!
Discussions
Beaucoup de travail dis donc ! Chapeau !
Splendide!
On voit peu les retouche de teinte!
Il m'est arrivé la même chose il y à 1 mois avec la teinture! Une semaine pour la faire partire lol.
Que ça serve de leçon lol
Belle remise en forme et bien préparée c'est de l'excellent travail!
Keke
Très instructif. Merci pour les commentaires détaillés et les photos, en particulier:
-celle du tiroir et des queues d'aronde du XIXème: moins nombreuses et plus larges que sur les tiroirs actuels (quand il y en a);
-et celles des portes, je ne connaissais pas ce type d'assemblage (où "toute" l'extrémité de la traverse est encastrée dans le montant, aussi bien en parement qu'en contre-parement).
C'est le travail des scieurs qui paraît surprenant (au sens d'excellent): les planches (sciées à la main?)apparemment étaient sciées de façon très rectilignes, sinon le menuisier n'aurait pas pu utiliser les planches sans avoir à les raboter avant.
Intelligent le choix des bois: le merisier en façade pour son esthétique et le chêne ailleurs pour sa solidité.
Bonjour Francisco,
Les scieurs de longs "tout à la main" il devait peut être en rester milieu 19°, mais il y avait aussi des scieries motorisées à la vapeur ou à l'hydraulique. Les planches sciées de cette façon ne devaient pas être très différentes de celles qu'on retrouve aujourd'hui.
petite vidéo trouvée sur le net sciage de long : il faut cliquer sur les images à droite de la page
Version "industrielle". Il faut un cours d'eau et une roue à aubes pour mettre en mouvement.Banc de scie
Belle restauration,toujours émouvant ,on ne peut s'empêcher de penser au gars qui a réalisé cette oeuvre; c'est plutôt un "BAHUT" qu'une "COMMODE" meuble à tiroirs,on lui a donné ce nom parce que c'était plus pratique pour ranger les vêtements que les coffres.
Merci pour les commentaires.
Pour le nom c'est vrai, c'est plus un buffet / bahut qu'une commode, mais sur le coup le mot m'a échappé.
Salut, beau buffet bas et bel amusement, il est bouffé par les vers parce que il est en poirier, c'est le bois préféré des bébêtes.
Concernant les finitions, tu ne peux pas imiter une finition ancienne en utilisant des produits modernes sur du bois neuf, il y a des techniques mais qui comme le travail du bois demandent une grande expérience....
la 1ère c'est de ramasser tout ce qui est vieux bois ( meubles cassés, bois de lits)dans les essences qui te conviennent.
Ensuite c'est de teinter à l'ancienne et surtout oublier les cires teintantes( je te rassure j'ai aussi utilisé celles-ci)
Concernant la mécanisation du sciage du bois ,je connais une scierie au haut fer qui fonctionne avec une roue à aube, les pignons de roue dentées sont en pommier ( c'est un musée , mais ils font des démos de sciage de grumes.