Dans le cadre du Grand Remplacement d'une belle planche de fraké par une moche planche de fromager tenant lieu de support pour mon tour à bois (maison) et la perceuse à colonne (maison) de mon petit atelier, j'ai eu l'idée lumineuse de remplacer (aussi... ça devient une idée fixe ça...) les tréteaux que j'avais fabriqué il y a trois mois (jolis, sophistiqués, hauteur réglable, qui iraient mieux en tant que support du plateau de mon bureau d'architecte) par des petits tréteaux plus simples, à hauteur fixe et bien moins profonds. Voici leur histoire.
On a commencé par débiter les bois. J'avais acheté chez un dioula à coté spécialisé en bois de récupération (oui, oui, on vend ça ici) deux planches crades et vilaines en fromager, je n'avais pas envie de dépenser trop d'argent pour un truc qui a des chances de finir en barbecue dans deux mois. La plus fine a subi un grattage sérieux avec une "carte" grattoir, une tonne de poussière est descendue et la planche a fini par avoir une gueule un peu plus respectable. La deuxième, plus épaisse et moins sale, a été débitée et a donné les quatre pieds et les deux traverses latérales (pas celles à queues d'aronde, les autres). Tout débité un peu plus long, pour être sur. Comme d'habitude, les cotes du projet ne correspondent pas, la planche ne se divise pas en x mais en x-0.5, etc... Pour les traverses à queue d'aronde des chutes d'acajou ont parfaitement fait l'affaire. J'ai un ou deux mètres de rond en hêtre, un de 8mm, un de 15, ce n'est pas très local mais bon, pratique et acheté chez Mister Bric... ça fera les tourillons. Tout ça, bien entendu, est un prétexte pour travailler mes queues d'aronde, qui deviennent bien meilleures avec mes scies japonaises achetées à vil prix sur eBay (Dieu que c'est cher, le transport pour envoyer du matos en Côte d'Ivoire... mais même avec ça, c'est moins cher que d'acheter chez les spécialistes libanais locaux, et des scies japonaises, c'est simple, on n'en trouve pas).
Mais je divague. Donc des tourillons, taillés dans du rond de 8mm et ceux du plateau, dans du 15. Le plateau, justement. Une chute d'une porte faite dans un hypothétique latté de fromager avec le parement en placage épais d'un bois coupée en deux morceaux de 450mm de long et, après rabotage, 118 de large, sur à peu près 50mm d'épais, plaqués sur les cotés ou on voit le bois de bout des lattes de fromager avec des chutes diverses qui traînent, et le crapaud est devenu prince charmant.
La grosse pièce support en dessous du plateau a été rabotée à une cote quelconque, et surtout d'équerre, et les quatre pieds fixés dedans avec des tourillons, deux par pied. J'ai d'abord percé le support central (un beau morceau de framiré, joli et super agréable à travailler) au bon emplacement.J'ai fixé les pieds en position avec des serre-joints sur l'établi, et en utilisant les trous pré-percés j'ai poursuivi à travers la partie haute des pieds. Ca tourne de l'autre coté, les deux autres pieds sont percés et tout ça attend gentiment la suite.
Les traverses en acajou sont préparées avec les queues d'aronde (sur environ 2/3 de leur épaisseur, ce qui correspondait à environ la moitié de l'épaisseur du pied, comme ça les queues laissent assez de "chair" aux pieds pour tenir), les entailles dans les pieds également (le bonheur réside dans des ciseaux à bois bien affûtés, on doit faire des entailles sur la moitié de l'épaisseur donc un peu de scie et beaucoup de ciseau) et collage, paire de pieds par paire de pieds.
Les traverses en fromager, trapézoïdales, sont en principe plus faciles a faire, les entailles vont vite, il faut juste bien caler l'angle (il y a des petits ratés mais ça l'a fait finalement). L'astuce est de positionner le tréteau sur l'établi, dans sa position finale, maintenu par des serre-joints, de poser la pièce un peu plus longue contre le tréteau dans sa position finale et de tracer dessus l'angle de coupe. C'est simple et rapide, et on ne peut pas se rater.
Ensuite assemblage, collage, serre-joints et on laisse se reposer jusqu'à demain (moi aussi, remarque). Par sécurité quelques trous laissent la place à deux tourillons par pied, à travers les traverses trapézoïdales (celles à queue d'aronde pour une fois sont assez bien réussies, ça ne bouge pas d'un poil). On laisse sécher la colle, et on s'y met, au plateau s'il vous plat.
Le plateau. J'ai commencé par percer des trous à travers en 15mm de diamètre, pour y positionner les gros tourillons qui vont traverser le plateau et se fixer dans la grosse pièce en framiré qui le supporte (parce que je trouve ça sympa, et parce que ça renforce quand même une pièce dans un sens... dans un sens ou elle ne travaille pas vraiment. OK, c'est surtout joli et je maîtrise le positionnement avec plus de précision). Je perce ensuite avec du même 15mm (mèche plate) au centre du support central, présente le plateau, le cale avec deux serre-joints et perce les quatre autres. On colle, fait rentrer avec le petit maillet les tourillons, serre tout aux serre joints et on attend que ça sèche. Le coup le plus chic est quand on arase le tout avec la Kataba. Au final, après séchage, quelques coups de rabot et un ponçage et la plus jolie partie de l'ensemble sera le plateau.
La touche finale sera donnée avec de la Danish Oil maison. Il faut pardonner, mais on n'a pas tout ici. Déjà, l'huile de lin, je la trouve chez Mister Brico... à un prix de voleur de grand chemin, heureusement que chez mon libanais du coin le vernis (pompeusement appelé "marin") n'est pas cher, je fais mon mélange et ça passe bien. Il rend particulièrement bien sur l'acajou, mais c'est sur que l'acajou local (khaya ivorensis) est super facile à travailler et souvent très joli (et puis il sent super bon quand on le coupe). Sur le fromager c'est simple, rien ne rend bien... C'est drôle qu'un arbre aussi majestueux peut produire un bois d'aussi piètre qualité. OK, peut-être qu'il vaudrait mieux qu'on le laisse décorer les savanes...
Voilà ça. Il y a un plan aussi, pour ceux que ça intéresse.
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Discussions
Ils sont sympas tes tréteaux mais j'ai un doute sur leur stabilité latérale.
Tu peux nous en dire plus à ce sujet ? Retour d'expérience/d'utilisation peut être ?
Pour l'instant j'ai juste fait un "proto", en effet sur le plan l'evasement des pieds est plus important qu'en vrai et je pense que ce serait mieux. Mais je vous en dirai plus quand je mettrai le plateau dessus.
Beau travail !
Merci, j'essaie de m'améliorer
Joli et très beau travail , ils ne sont pas larges c'est pratique pour les petites surfaces , lattes etc..
Merci beaucoup, c'était justement ce que je voulais, pas trop encombrants et simples. Je mettrai des photos de ceux qu'ils sont censes remplacer, ils sont bien plus élaborés, réglables en hauteur et tout.
sympa !
Merci !
De beaux tréteaux.
Pour rebondir sur la remarque de xyloweb, si ils sont destinés à supporter de l'outillage, pourquoi ne pas ajouter une etagere sur les traverses inférieures. Cela créerait un espace de rangement, dont le poids assurerait une meilleure stabilité.
En tout cas, bravo et merci pour le partage.
J'avoue ne pas y avoir pensé, mais c'est une super idée, j vais l'adopter. Le degré zéro de l'étagère pourrait être une planche portée par les deux tréteaux, posée sur les traverses basses, qui sont relativement hautes par rapport au sol (240 mm si je me souviens bien... j'ai la tête dans tout à fait autre chose depuis deux jours, notamment l'aménagement d'un parvis paysager entre les tours de la Cité Administrative d'Abidjan... mais il y a des jolies pergolas en bois de prévues). Ça pourrait supporter un tas de choses, par exemple des caisses avec des chutes de bois qu'on n'a pas le cœur à utiliser au barbecue. En effet, ça apporterait un plus de stabilité.