L'Air du Bois est une plateforme Open Source de partage collaboratif ouverte à tous les amoureux du travail du bois. (En savoir plus)

Rejoindre l'Air du Bois Se connecter

txintxo

Marqueterie femme au papillons


Bonjour, je vois que le site s'intéresse au placage, j'en profite pour poster une marqueterie que j'ai réalisé l'an dernier. Je ferrai surement un autre article pour le meuble galbé dans les semaines qui suivent car il n’est vraiment pas simple à réaliser. A noter que la forme du meuble et la première maquette pédagogique ne viennent pas du tout de moi, mais d’un ébéniste très talentueux du Sud Est de la France qui s’appelle Serge Therond !

Dans le cadre de la fabrication de ce meuble d'école, le choix des plaquages et des marqueteries nous a été possible dans la mesure du temps imparti. Ceux qui voulaient faire de la marqueterie n’avaient comme autre choix de le faire chez eux du coup.
Vu que je ne suis pas équipé ni de scie à marqueter, ni de petite scie à chantourner j’ai décidé de le faire au scalpel, sur mon bureau.
Les puristes ne sont pas friands de cette méthode pour deux raisons, la première c’est qu’elle n’est pas traditionnelle, et la seconde qu’elle est quasi impossible à mettre en oeuvre dans un atelier professionnelle vu le temps d’exécution.
Ayant déjà testé la technique dites Boulle, et celle pièce par pièce, j’ai voulu essayer cette troisième qui est à la portée de tous les amateurs à condition d’acheter un scalpel et des lames à la pharmacie du coin ( prenez en d’avance d’ailleurs, parce que ça casse facilement croyez moi hihi)

Tout d’abord, il faut faire le choix des plaquages. Ici c’est un fond en sycomore. Je voulais utiliser un sycomore ondé à l’origine car je le trouve absolument magnifique puis j’ai changé d’avis de peur que le motif central se perde dans les «  ondes » du bois clair.
Le visage papillonné est découpé dans de l’ébène de macassare.
Souvent les marqueteries «  anciennes » étaient réalisées avec une multitude d’essences afin de donner une palette de couleurs plus vaste et accroitre le réalisme des scènes ( je ne parle pas bien sur des marqueteries Boulle qui étaient bichrome, composée d’écaille de tortues et laiton souvent) Je n’ai pas fait ce choix la, ce meuble se veut contemporain et je crois qu’utiliser plus de 2 ou 3 essences l’aurait sorti de son style. Je voulais le motif percutant, je suis parti sur une silhouette (encore une fois), représentant une femme ( encore une fois ^^), avec sa tête qui se décompose en papillons pour ajouter de la poésie. J’essaye d’inclure sur chacun de mes meuble une représentation humaine féminine pour mettre en valeur les charmes de ces dames.



techniquement:

Pour commencer, les feuilles de plaquages ne dépassent pas souvent les 250 ou 300 mm de large, il faut ainsi en découper plusieurs et les «  dresser » afin de les jointer pour que chacune d’elle vienne parfaitement se coller sur la tranche de la suivant et que le joint soit le plus invisible possible. La encore il y a plusieurs méthodes.

La première consiste à presser la feuille ( une ou plusieurs empilée parfaitement) sur un établi ( en pensant bien à mettre un contreplaqué martyr dessous pour ne pas abimer ce dernier). A l’aide d’un bois dégauchi que l’on serre entre le plaquage et le contreplaqué sur l’établi, on scie à la main avec une scie à plaquage. on recommence l’opération avec toutes les autres feuilles.

La seconde que j’utilise assez souvent, c’est exactement la même sauf que l’on met deux feuilles de plaquages l’une sur l’autre mais pas empilées parfaitement. On les mets en forme selon le support définitif où elles vont être collées. Cette technique permet de faire le joint sur des parties cintrées ou en bosse.
Souvent on coupe le plaquage droit, la 1er technique fonctionne certes si on les colle sur des éléments plans ou galbé dans une dimension. Mais lorsque l’élément est galbé dans deux dimensions on est obligé de prendre les deux feuilles de plaquages, les mettre en forme définitivement, les serrer avec un contreplaqué cintrable préalablement dégauchi et les couper directement sur la partie à coller. C’est cette technique que j’ai utilisé sur le haut du meuble, les côtés du cylindre sont galbés dans tous les sens, un vrai casse tête pour les joints de plaquage !

La troisième méthode consiste à serrer à l’aide de visses en bout plusieurs feuilles de plaquages entre deux bois de sections assez conséquentes ( 50x50 par exemple) et de les dégauchir à la dégo tout simplement. Ca marche très bien, à noter qu’il faut faire des petits passages tout de même car les champs de plaquage peuvent éclater facilement surtout sur des essences exotiques genre ébène où le fil présente des motifs singuliers, mais c’est pour ça qu’on les aime hein !

Lorsque tous les champs sont dressés on les met côte à côte et les maintient en place à l’aide de « scotch papier classique » ou « papier gommé ». Le papier gommé ne colle que si on l’humidifie au préalable, c’est le plus utilisé en marqueterie mais honnêtement je ne suis pas convaincu de ses résultats comme quoi il serrait plus simple à décoller que le scotch papier de peintre. Chacun a ses préférences, je n’ai toujours pas choisi la mienne. Seul avantage, c’est plutôt rigolo d’humidifier le papier gommé avec la langue, on a l’impression de donner plus de coeur à l’ouvrage ^^

Ensuite il y a la découpe du motif, la partie la plus longue et fastidieuse.
Ici j’ai d’abord redessiner tout le motif sur l’ébène au crayon le plus fin possible et découpé le visage au scalpel et les papillons dans une même feuille pour garder une cohérence du fil du bois une fois le tout collé. L’ébène étant très cassant, ça a été une sacrée épreuve de patience, pas moins de 20 heures de découpe auront été nécessaires pour faire le tour.
Puis j’ai réutilisé ce que je venais de découper pour le poser sur mon fond et le reporter au crayon le plus fin possible toujours ( en l’occurrence un criterium) et je me suis attelé à la découpe du sycomore. La il m’aurait fallu seulement deux heures, le bois très homogène était un véritable bonheur à découper à ma grande surprise.

Si l’on est précis, les deux motifs s’intègrent correctement et on les maintient avec du papier gommé. Faire très attention à mettre le papier gommé côté parement, c’est à dire sur le côté qui serra visible une fois tout collé! C’est primordial car on ne colle pas une marqueterie avec du papier gommé entre le plaquage et le support, sinon cela risque de se décoller dans le temps !
Si on est moins précis le motif ne rentre pas et nécessite quelques retouches, c’est du temps à passer mais rien de très grave.
Si on est encore moins précis, le motif rentre mais flotte dans le fond. La c’est plus grave, il faut recommencer tout le fond sinon il aura des jours au moment de coller et … c’est très vilain de devoir remplir ces derniers avec de la pâte à bois ou de la cire dure.

Lorsque les deux parties sont terminées et maintenues par le papier gommé en contre parement, on passe à l’étape la plus délicate, le collage.

Je déteste les collages et pour cause des litres et des litres de sueurs coulent à ce moment la. Soit le collage est réussi et c’est normal, soit il est raté et c’est la cata de chez cata. Il n’y a aucune satisfaction à tirer d’un bon collage car le collage doit forcément être réussi, c’est en ça que cela me déplait ^^

Donc ici plus qu’ailleurs il faut tout prévoir d’avance et faire un montage à blanc avec les cales préformées et tout le tintouin car une fois la colle posée, l’heure tourne et pas en notre faveur! le collage réelle ne se passe jamais comme le collage à blanc, il y a toujours un facteur que l’on ne maitrise pas, quelque chose auquel on a pas pensé, et cette fois c’est le motif qui s’est décallé un chouilla dans la presse sous vide, il a fallu agir vite, enlever le vide d’air et vite maroufler à l’aide d’un marteau à plaquage. Pour finir j’ai relancé la presse sous vide non sans peur et attendu quelques heures.
Au moment du démoulage, c’est terrible, soit tout le travail est anéanti par un mauvais collage, soit c’est bon. Pour cette fois, pas de soucis le tout s’est bien collé et j’ai pu enlever le scotch délicatement en le mouillant et en le raclant. Vu que j’ai collé à la colle blanche, j’ai pu recoller certaines parties en utilisant un fer à repasser. je ne vais pas m’étaler dessus, dans un article précédent quelqu’un en a très bien parlé avec les différentes colles à utiliser pour le plaquage ( os nerf de boeuf, poisson, blanche ou Néoprène).

Le ponçage:

Ici, j’ai eu pas mal de problèmes, tout les pores du sycomore se remplissaient de poussière d’ébène et le résultat était vraiment pas jojo. Le mieux c’est de se munir d’une soufflette ou d’un aspirateur et de souffler ou aspirer dès qu’un peu de poussière foncée s’évade sur le blanc.

Finition:

Tampon gomme laque.


Discussions

mokozore
( Modifié )

Merci pour tout ce détail technique. Pour un béotien comme moi, c'est impressionnant.

niconathy
( Modifié )

le meuble est très réussit. il trouve parfaitement sa place (photo noir et blanc).
comment as tu procédé pour le bi-ton des pieds.
est il possible de voir l'intérieur?

txintxo
( Modifié )

je ferrai un autre article pour le meuble, faudra que je trouve le temps ;)
tu devrai trouver ton bonheur niconathy quant à l'intérieur sur cette vidéo à partir d'une minute.

vimeo.com/100149325
thomaslonguefosse-ebeniste.fr

Boris Beaulant
( Modifié )

Bel ouvrage et belle marqueterie. Je ne suis habituellement pas un grand fan des grandes marqueteries (surtout s'il y a un gros mélange d'essence). Mais là je dois dire que ça s'intègre vraiment bien. Félicitations. Et merci pour ce descriptif complet !

txintxo
( Modifié )

Je ne suis pas très marqueterie moi non plus , le travail que ça demande est souvent considérable comparé aux résultats obtenus,c'était pour essayer. d'ou le choix d'un motif à deux couleurs, bien efficace, avec des formes compliquées à découper ^^

arnouch
( Modifié )

Classe, j'aime beaucoup; le choix des essence est judicieux et la répartition.. l'ensemble est assez féminin et moderne, ambiance piano bar, excellent.
Le motif m'a fait pensé à des oeuvres de kirigamie de Daniel Mar, c'est l'art du papier.
Voici un lien:

artpapier.fr/A..._Papier/g8.html

C'est tout à fait transposable en marquetterie; et ce n'est pas trop "lourd " comme on peut souvent voir.
Enfin, bravo c'est du beau boulot

txintxo
( Modifié )

Merci Arnouch pour ton commentaire, et surtout pour la découverte de Daniel Mar, je ne connaissais pas, j'adore tous ces trucs de découpages. Ces deux dernières années j'ai pas mal voyagé en Asie et ça me fait beaucoup pensé à tout ça, je vais creuser :-)

gilles
( Modifié )

Bonsoir txintxo,
Toutes mes félicitations pour ta marqueterie, elle est très réussie. Le meuble est joliment marqueté. Comme les commentaires précédents, à mon tour je te dis merci du partage et du détail de fabrication. Le mariage du sycomore et de l'ébène de macassar s'unissent à merveille. Bravo c'est du travail d'artiste

gilles
( Modifié )

C'est encore moi, j'ai lu que ta finition était au tampon gomme laque. As tu suivi une formation pour maîtriser ce savoir ? Je n'ose pas me lancer car je n'aie aucune formation dans le domaine. Bravo, la finition est très réussie.
Amicalement

racmterrof
( Modifié )

Bravo pour le travail ,bravo pour le sujet de la marqueterie.

txintxo
( Modifié )

J'ai travaillé deux ans chez un restaurateur de meubles anciens qui m'y a initié mais jamais je ne dirai que je sais réellement faire un vernis au tampon, c'est un métier et ce n'est pas vraiment le miens ^^ je n'ai vernis que deux commodes de cette manière et mon patron m'avait fait faire ça pour tester ma patience. Sur le bureau cylindre du dessus, j'étais en formation et honnêtement ce n'est pas un vrai vernis tampon traditionnel, l'école a voulu testé un nouveau produit, ( le sayer laque) qui se passe avec un tampon classique en une dizaine de passage, plus on en met plus ça brille, et en 20 minutes l'affaire est plié. Le résultat quant à lui est satisfaisant mais rien à voir avec un vernis tampon tradi.
Normalement sur un meuble entier, il n'y a en quantité qu'un dé à coudre de vernis, je sais que ça parait fou mais j'ai vu de mes yeux vu mon ancien patron le faire à maintes reprises et le résultat est époustouflant à chaque fois, pas moins d'une dizaine d'heures est nécessaire pour une commode, et ça c'est quand on a l'habitude !

bernardrebout
( Modifié )

Joli travail pour la partie marqueterie et merci pour tes explications, la marqueterie c'est de l'art et de la technique
La technique que tu as utilisée est une des plus anciennes , qui est un peu modifiée , en effet autrefois
les artistes taillaient leurs bois et les incrustaient en les collant dans des cavités creusées dans un support;
La marqueterie est un art très ancien qui a laissé des traces de cette technique en Asie mineure à Halicarnasse dans le palais du roi Mausole ,350 ans avant JC.
Ensuite elle s'est développée sous l'empire romain et c'est en Italie que c'est développé " l'intarsia certinosa" Après le démembrement de l'empire romain cette technique s'est perdue pour réapparaître au XIV ème siècle en Toscane , c'est ainsi que s'est développé la "tarsia geometrica" qui est la technique de recouvrement par des motifs assemblés et non plus insérés dans des cavités.

je reviens au vernis au tampon qui est mon favori depuis longtemps , je le fabrique moi-même.
Quand tu dis que ton patron utilise très peu de vernis , j'imagine que tu parles de meubles anciens qui sont déjà remplis?

Concernant le tampon ,j'utilise cette technique même pour le polyuréthane.
Au fait les placages collés à la colle chaude se vernissent beaucoup plus rapidement que ceux collés à la blanche... c'est du au fait que pour fabriquer des placages en 0,6 ils sont structurellement modifiés par la vapeur.

Pour Gilles , le verni au tampon s'apprend .....en vernissant et chaque vernisseur a son coup de main!
A tel point que si ma femme commence un vernis ,je ne peux pas le continuer et vis versa!
J'ai appris en restaurant des meubles anciens , c'était plus simple que d'en fabriquer quand on ne connaît rien.

Sujet très intéressant!
Désolé pour le côté histoire!

txintxo
( Modifié )

Oh non, c'est super d'avoir développé la partie historique, comme ça tout le monde en profite, vous m'avez appris pleins de choses :-)
Pour ce qui est du vernis, il est vrai que les meubles que j'ai restauré étaient anciens et deja rempli, mais il a quand même fallu faire le bouche porage au préalable, c'est cette partie qui m'a paru bien longue car si on laisse trainer un peu de ponce et que l'on vernis par dessus, des traces blanches apparaissent par la suite et c'est pas tip top. Les placages étaient recollés à la colle d'os et ne mesuraient pas 0,6 mm vu que c'était des plaquages anciens, donc sciés et non étuvés surtout, il s faisaient au moins 2mm ...

bernardrebout
( Modifié )

c'est ce qui aide en partie dans la datation d'un meuble ancien, l'épaisseur du placage . Rien à voir avec les placages actuels !

txintxo
( Modifié )

Les fils de Georges sur Bagnolet en font encore du plaquage scié ... mais ça coute un bras hahaha

gilles
( Modifié )

Il est vrai que chacun est libre de choisir l'épaisseur de son placage en fonction de ce qu'il veut en faire. Il m'est arrivé de faire un tableau avec du 1,5mm. En général, j'achète mon placage 0,9 mm chez J.George et j'en suis très satisfait.

bernardrebout
( Modifié )

la discussion se situait placage tranché ou placage scié et vernissage au tampon , quand on achète du plage scié , on peut être " scié " par le prix ce qui ,quand on connaît les deux types de production n'est pas étonnant du tout!

txintxo
( Modifié )

pour un rendu final qui pour ma part ne justifie pas la différence de prix. J'utilise du placage tranché et j'en suis très satisfait!

bernardrebout
( Modifié )

Pas de souci, l'important c'est de se faire plaisir et surtout si tu dois en vivre , tu dois calculer tes coûts et connaître tes marges.

Regis
( Modifié )

c'est tout simplement magnifique ! Félicitations !

Mathieu Montigny
( Modifié )

Très beau !!!
les proportions et les couleurs sont parfaites
je ne fait pas de marqueteries (car je ne sait pas faire!!!) et je trouve que ta réalisation montre que l'on peut faire d'autre chose que de la restauration et aussi plus actuel ,bref c'est beau ...

sylvainlefrancomtois
( Modifié )

ton bureau à cylindre est une parfaite synthèse entre l ancien et le modernisme ,il est superbe !ébénisterie traditionnelle est un super métier !!j ai regardé ton site ,j ai bien aimé aussi . plein de taf a toi !!!

Jeffpat

Très belle réalisation,je suis actuellement en formation à l’ESEA et avec Serge 😎

Connectez-vous pour ajouter un commentaire.
2 026 vues
23 commentaires

Publications associées

0 question
0 plan
0 pas à pas
0 processus
0 fournisseur
0 école

Licence

Licence Creative Commons
Autres créations de txintxo
Voir aussi