Bonjour à tous,
Je viens de voir ce poste, qui montre une situation effectivement désolante pour cette personne qui se retrouve ruinée à cause de l'incompétence et finalement de l'escroquerie de l'artisan qui lui a fourni cette méchante bicoque. Cela est plus fréquent qu'on ne le pense: je connais une personne dans un petit village du Doubs qui a fait refaire sa charpente par une entreprise tenue par des filous, sensiblement moins chers que la concurrence, qui ont retiré des poutres structurelles en remplaçant la tenue du toit qu'elles assuraient par une espèce de lambrissage qui s'effondrera aux premières neiges. La propriétaire est alertée mais n'entend rien faire pour le moment.
Mais cette anecdote n'est pas essentiellement ce que je voulais dire. Je voulais parler de la rupture de transmission dans notre pays en particulier et en Europe en général. J'ai vu récemment sur ce site une vidéo consacrée à l'école Boulle, où un jeune homme était présenté comme sculpteur sur bois et passait son diplôme dans une section équivalente à "Conservation du Patrimoine", si mes souvenirs sont bons. Et j'ai été stupéfait de voir qu'en terme de "conservation du patrimoine" il réalisait en argile une espèce de sculpture contemporaine représentant l'anamorphose d'un samouraï, et qu'il s'avérait incapable de la sculpter dans le bois dans la mesure où il se servait d'un procédé de copie avec bras articulé et routeur. Rien à voir donc ni avec le patrimoine ni avec la maîtrise réelle de ce que demande la sculpture sur bois, mais bien plutôt une vague mise en avant de je ne sais quelle créativité totalement déconnectée des impératifs d'une réelle transmission. L'école Boulle fait naufrage et ce n'est pas la première vidéo que je vois sur le sujet: j'en ai vu une où l'on suit une promotion entière de jeunes tout emplis d'eux-mêmes par le discours lénifiant des adultes qui les entourent et qui donnent libre cours à leur "créativité", ne maîtrisant absolument aucun savoir-faire. Les profs sont réduits à l'état d'ombres errantes mutiques qui ne transmettent plus rien. Ce n'est pas ainsi qu'on saura restaurer demain notre patrimoine.
J'en viens à la remarque centrale que je voulais faire: dans mon domaine, la musique, il en va de plus en plus de même. Des spécialistes autoproclamés en "sciences de l'éducation" sont maintenant durablement implantés comme des coucous dans les cursus de formation des jeunes profs et délivrent à leurs esprits aliénés par la société de consommation et le tout-à-l'égo qu'elle promeut des discours débilitants et démagogiques, où "l'apprenant" (on ne dit plus élève, l'élévation étant devenu une insulte à la médiocrité commune) est mis au centre du processus d'apprentissage et où la dimension de transmission d'une discipline rigoureuse par l'imposition d'une forme est assimilée à une "violence symbolique" qui frise le fascisme. Résultat: la démagogie et la nullité commencent à faire tache d'huile dans mon domaine. Le fait que ce phénomène soit présent dans tous les domaines de la transmission (voir la faillite du système scolaire en général qui a donné le ton il y a déjà des dizaines d'années) indique ni plus ni moins le suicide d'une civilisation. La réponse à ce naufrage à l'heure actuelle est la transmission sur un mode préceptoral, de personne à personne, loin des institutions qui s'effondrent. Il faut transmettre aux jeunes qui nous sont proches le sens de ce que nous faisons accompagné de la haute technicité bien placée et bien comprise qui autorise seule l'émergence de ce sens. Pour ma part j'ai la chance de pouvoir le faire auprès de mes élèves que je vois un par un durant les cours et à qui je propose une exigence sans faille. Elle est très bien reçue parce que le sens de cette exigence est expliqué par moi et consentie par eux. Je suis dans un cadre très privilégié, il est vrai, pour assurer cette transmission, mais on peut le faire auprès des jeunes qui nous entourent, proches de la famille ou autres.
Le seul moyen à présent de préserver quelque chose passe par ce changement d'échelle: la société et les institutions sont défaillantes, il nous faut remédier à cette défaillance auprès des proches que nous avons en responsabilité. La famille est le lieu privilégié de cette transmission.
Je voudrais terminer ce long commentaire par un lien vers la page Facebook d'un tout jeune homme dont les réalisations parlent d'elles-mêmes et le parcours personnel illustre ce que je viens de dire à l'instant. Les nombreuses vidéos postées sur cette page sont très instructives sur l'horizon positif que nous sommes à même de construire au milieu de cette débâcle sociétale et civilisationnelle.
Ah, mince! L'humanité est toujours beaucoup plus contrastée et complexe que ce que les apparences donnent à voir... Tu as bien évidemment eu raison de lui dire ça, selon moi. Il est donc beaucoup plus de son époque qu'il n'y paraît... Cela dit ça ne remet pas en cause le fond de mon propos.
Bonsoir ghpl. Merci à toi! J'ai divisé le fût en quatre sections égales délimitées par quatre lignes. Sur chacune de ces lignes j'ai tracé un repère tous les centimètres de bas en haut, puis j'ai relié la naissance de chaque ligne (en bas) avec le repère situé un cran plus haut sur la ligne suivante dans le sens anti-horaire. J'ai ensuite creusé au dremel chaque ligne spiralée en la laissant en repère sur la gauche de chaque cavet. J'ai ensuite égalisé et adouci chaque crête saillante, et le tour était joué!
Merci beaucoup, Corps et Bois. J'ai acheté la KC100. Je l'ai eue à moins de 2000€ (à présent elle a pris 500€ chez le même vendeur):je m'en tire bien, donc... Je ne comprends pas pourquoi ce matériel est si cher...
Merci, Corps et Bois! J'ai contacté le service après-vente, et la personne qui m'a répondu m'a laissé entendre qu'il s'agirait d'un oubli de leur part, à confirmer...
La lubrification de la chaîne est automatique il me semble? ( je ne connais pas bien encore ce type d'outils) Sinon, peux-tu me dire si son utilisation présente des dangers particuliers? (je suis musicien, j'ai donc particulièrement besoin de mes mains - ce qui est le cas de tout le monde d'ailleurs mais c'est mon gagne-pain) - en espérant ne pas abuser de ton temps...
Merci infiniment pour toutes ces précisions, Corps et Bois! J'ai effectivement tendance à considérer que les machines qui doivent se tenir à deux mains sont moins dangereuses que les autres (comme par exemple une affleureuse, dont le niveau de sécurité me semble délirant à l'heure des multiples normes).
Il ne me reste plus qu'à attendre l'arrivée de mes chaînes...
Bonjour Corps et Bois,j'ai bien reçu de Maxoutil le kit complet de chaîne en... deux exemplaires, à la suite d'une erreur de leur part. Je les ai appelés pour leur signaler le problème, et ils m'ont dit de garder le tout... Fameux cadeau, quand on voit le prix de vente au détail!
Je ne veux pas abuser de ton temps, mais je voulais te demander quel type de graisse tu mets dans le stauffer? (marque, et éventuellement lien, si tu en as un). Faut-il également de l'huile de chaîne de tronçonneuse, comme tu sembles l'indiquer dans ton commentaire précédent, et si oui, à quel endroit l'appliquer? Enfin, quel tension appliquer à la chaîne? Doit-elle être très tendue, ou légèrement détendue?
Merci infiniment à toi, en espérant que tu trouveras le temps de me répondre.
Corps et Bois je te remercie pour toutes ces précisions et ces précieux conseils! Pour le moment je n'envisage pas forcément de revendre le deuxième kit de chaîne, qui pourra peut-être me servir ultérieurement. Si je vois que ce n'est pas le cas et comme tu as l'air intéressé, tu auras la primeur c'est promis!
Pour la chaîne j'ai acheté de la graisse rouge Oregon. Cela te semble-t-il bien?
J'ai un gros projet d'un portique en charpente destiné à prolonger sur 8 m ce que j'ai déjà fait et que l'on peut voir sur ma page, l'ensemble devant clôturer au sens propre une cour. Il y a une cinquantaine de mortaises à faire et c'est pour cela que j'ai fait l'acquisition de la mortaiseuse - je dois ménager mes mains... Il y aura des incrustations dans la charpente de trois quadrilobes sculptés en pierre, dont un est déjà terminé. Je reculais devant le fait de me mettre au travail, parce que je ne connais rien de plus dur que la charpente et je suis tout cassé après deux semaines de boulot, mais je m'y suis mis aujourd'hui et j'ai retrouvé ce plaisir si unique que j'aime tant- j'ai commencé la taille des tenons.
Corps et Bois, mille mercis pour tes précieux conseils!
Je me suis mis à la taille de pierre il y a quelques mois, donc c'est moi en effet qui taille ces quadrilobes, dont le premier m'a servi d'exercice préparatoire pour une rosace début quinzième, flamboyante donc, sur laquelle je travaille en ce moment. C'est un univers fabuleux également!
Corps et Bois, en voici un petit aperçu:
Merci à vous deux!
Je vais rajouter dès que possible une photo de l'horloge et du petit orgue ainsi qu'une vidéo de l'instrument en train de jouer - c'est juste une question de jours l'horloge n'étant pas chez moi.
Bonjour Racmterrof, le propriétaire de l'horloge m'a donné les deux tuyaux qui encadraient celui qui manquait: j'ai donc visé approximativement entre les deux en me plaçant un peu au dessus de la moitié, l'échelle des progressions de fréquences étant une suite géométrique exponentielle. De toute façon, l'enjeu n'était pas très serré, étant donné qu'un tampon vient boucher le tuyau pour le faire sonner une octave en dessous de sa fréquence nominale (tuyau ouvert). Il suffit donc de baisser le tampon pour faire monter la fréquence vers l’aigu, et au contraire de le relever pour qu'elle descende vers les graves.
Merci Kentaro! Sur un tuyau dit de Bourdon, comme je l'explique plus haut à Racmterrof, étant donné qu'un tampon vient boucher le tuyau pour le faire sonner une octave en dessous de sa fréquence nominale (tuyau ouvert), il suffit de baisser le tampon pour faire monter la fréquence vers l’aigu, et au contraire de le relever pour qu'elle descende vers les graves. Sur un tuyau ouvert coupé au ton, c'est beaucoup plus délicat, car il faut approcher la juste fréquence en retirant de la matière à l'extrémité supérieure, et gare aux dépassements! Cela dit, dans ce cas, sur les tuyaux en bois la bouche est munie d'une sorte de "barbe", plaquette d'étain insérée dans la lèvre inférieure qui fait baisser la fréquence à mesure qu'on la replie vers la bouche. On peut ainsi faire des ajustements fins.
Si vous avez besoin de...tuyaux , je peux vous renseigner, je m'y connais très bien en facture d'orgue. Le cas échéant, n'hésitez pas!
Mais rien ne vaut à mon sens une discussion réelle qui permet d'aborder de manière plus directe et moins théorique des points qu'une approche méthodique tiendrait à distance les uns des autres, ne permettant pas une approche de ces points plus vivante et directement reliée aux problèmes que l'on se propose de régler. C'est pour cela que j'avais proposé à Kentaro de répondre à ses questions s'il venait à en avoir et s'il le souhaite.
Kentaro avec grand plaisir! Je pourrai même vous faire un petit concert si vous voulez! En ce moment je vais souvent en Bourgogne où je taille une rosace début XVème (ce pourquoi je travaille peu le bois en ce moment): ce serait une excellente occasion! Je peux éventuellement avoir accès à l'orgue de Gray.
Merci à vous Olivier et Glaude pour vos commentaires qui me font très plaisir! J'ai plein de casquettes différentes dans la vie - art et philosophie - et je me suis fait souvent jeter par mes pairs pour cette raison: défaut de lisibilité. Je préfère ne plus me présenter à cause de ça. Mais je suis drôlement content d'être parmi vous et de pouvoir échanger avec des gens qui aiment le travail du bois!
Ça c'est sûr. Le problème de la cnc, c'est que ça ignore complètement toute notion de geste, et vient introduire une approche numérique et industrielle, donc totalement impersonnelle, dans un domaine où elle n'a rien à faire. Cela avait déjà commencé avec le mobilier bourgeois au XIXe siècle, avec les moyens dont ils disposaient à l'époque, et ça avait fini par stériliser complètement tout style et toute expressivité. Il faut revenir à la singularité de ce qui n'est pas reproductible, mais interprétable, et il vaut mieux un résultat imparfait qui se cherche que la perfection glacée des machines. Le grand crash industriel qui va probablement commencer tôt ou tard vu le contexte, malgré toute la misère qu'il va engendrer, va sans doute nous y aider.
Merci FMJ! Je dois dire qu'au début j'ai été pris un peu de vertige, en me demandant comment j'allais m'en tirer...
dependancesbois, je colle à la colle blanche du papier journal sur un support et la pièce à sculpter de même sur le papier. Il suffit à la fin du travail d'introduire un ciseau à bois entre le support et la pièce, qui se détache très facilement. Un petit coup de ponçage et il n'y paraît plus!
Olivier Vernhettes merci pour ton commentaire: je me sens bien et à l'aise parmi vous grâce à votre gentillesse, c'est suffisamment rare pour mériter d'être mentionné! Les outils électriques me font une peur bleue. J'ai dû en acquérir quelques-uns mais je m'en sers le moins possible. La sculpture n'est pas très dangereuse si on respecte des protocoles élémentaires comme la règle du triangle, avec l'outil qui pointe toujours en dehors, et qu'on a des outils très bien affûtés. La chose à éviter absolument est de tenir d'une main une pièce que l'on travaille de l'autre... accident garanti!
Bonsoir Kentaro. Je parle de ce sujet ici uniquement pour répondre à ta question, en espérant que la modération ne va pas me tomber dessus! Donc: tout ce qui touche à la circonscription la plus juste et étroite possible du domaine de pertinence de la science. Je m'inscris dans une perspective moniste et relationaliste, respectivement à la suite de gens comme Ernst Mach et A.Whitehead, qui débouche sur une critique radicale du formalisme scientifique étroit qui a tendance à tout envahir présentement. Je développe dans ce cadre une ontologie particulière fondée sur la distinction entre les notions de "vrai" et de "vérité", et sur une analyse critique du langage.
Kentaro Merci à toi! Oui je fais des conférences, la prochaine en principe si les conditions sanitaires le permettent début juin à Paris.
Tu ne crois pas si bien dire, car, toutes proportions gardées bien évidemment, je n'ai, pas davantage que Spinoza, de formation académique en philosophie. Je pratique cette discipline avec (presque) autant de plaisir que le travail du bois!
Oak Merci à toi, chêne (c'est comme ça qu'on dit oak en anglais, n'est-ce-pas?), de me rassurer sur ce point! Je peux vous dire que je connais plein de milieux différents, mais je n'en ai jamais rencontré un seul aussi sympathique et agréable que celui du bois, que je ne connaissais pas: je m'y sens bien!
Oak C'est tout-à-fait la vie comme je l'entends!
Bonsoir Folgansky! Ta question n'est pas candide mais très intéressante au contraire. Oui, la machine a non seulement menacé les réalisations d'art, mais les a presque conduits à la disparition, en raison, selon moi, du mécanisme historique suivant: l'essor de l'industrialisation à partir du 18e siècle, qui s'est caractérisé par une atomisation du geste de l'artisan en unités plus petites, fragmentées et contrôlées par des processus mécanisés, a été concomitant, comme tu l'évoques bien, de l'apparition d'une classe bourgeoise dont la prééminence dans les sociétés du 19e siècle a été définitivement fixée par les mouvements révolutionnaires de la fin du siècle précédent. Cette classe bourgeoise se caractérisait par deux éléments principaux: 1) sa volonté d'égaler voire de remplacer les classes aristocratiques qui avaient tenu le haut du pavé jusque-là, sans pour autant jouir d'un héritage culturel et symbolique suffisant pour de semblables prétentions; 2) le fait qu'elle était très sensiblement plus nombreuse que la toute petite - en terme de nombre - classe aristocratique de l'ancien régime. Il fallait donc pourvoir ces nouvelles cohortes en biens et mobiliers de toutes sortes qui devaient à la fois singer les styles anciens et être produits en grandes quantités. Le développement des machines, permettant une reproductibilité quasiment à l'infini de formes nécessairement schématisées allait de pair avec le manque de goût et d'éducation de ces nouvelles classes de parvenus, qui n'y voyaient donc que du feu - avec comme toujours de notables exceptions, bien sûr. Cette classe de parvenus était certes riche, mais pas au point de pouvoir dans sa majorité se payer les services de maîtres artisans, qui ne peuvent quant à eux travailler que dans un temps long, décorrélé du nouveau temps industriel accéléré et rentable. C'est comme cela que l'industrialisation des métiers jusque-là tenus par des artisans a conduit à une dépersonnalisation progressive de leur art, et au risque d'une perte de savoirs-faire qui, au-delà du simple geste technique, portaient sur le sens fin des proportions, de la manière de pousser les détails sans jamais perdre de vue l'équilibre général, et sur des finesses de métier pratiquement impossibles à transmettre autrement que par l'exemple. Il n'y a bien sûr aucun jugement ni dédain dans ma manière d'en parler: je constate juste des faits. Les nouvelles conditions de production de la modernité, qui obéissent à ses impératifs économiques propres, sont dépersonnalisantes, et conduisent irrésistiblement à remplacer les commodes Boulle par des placards Ikea...
Folgansky , je pense que le processus s'est accompli en deux temps. La petite bourgeoisie a constitué une cohorte très nombreuse qu'il fallait pourvoir en objets manufacturés: pour satisfaire une telle demande il y fallait des usines qui ont aspiré nombre d'artisans modestes qui pourvoyaient autrefois aux besoins de l'ancienne classe du tiers-état, à laquelle ils appartenaient d'ailleurs. L'industrialisation croissante des domaines qui étaient auparavant tenus par l'artisanat est indissociable de l'émergence des phénomènes de marché et de la naissance du capitalisme: les propriétaires de ces mêmes industries sont devenus peu un peu extrêmement riches - comme par exemple la famille Wendel, propriétaire des forges lorraines qui pourvoyaient en fonte et en acier l'industrie ferroviaire et l'architecture. Dans le même temps les croyances se sont modifiées et on est passé d'un monde dominé par l'esprit et une certaine forme de spiritualité à un monde profondément matérialiste et sans Dieu, comme Nietzsche l'a bien exprimé avec son "Dieu est mort". Les hommes ne pouvant pas se passer de religiosité l'argent a remplacé peu à peu cette dimension, et la machine a commencé à s'emballer: utilisation de la mode pour démoder au plus vite les productions de la veille et pour contraindre les gens par la persuasion à acheter sans cesse, production bon marché de plus en plus polluante, etc... pour enfin arriver au terme de l'exercice avec notre époque où tu as des multimillionnaires ou milliardaires qui sont de véritables cas psychiatriques, et qui déclarent systématiquement qu'ils ne se sentiront en sécurité qu'en possédant le double de ce qu'ils possèdent déjà, dans un contexte où du fait de cet emballement industriel et capitalistique l'environnement s'est gravement dégradé, comme trente six seb l'indique très justement. Et ce qui a accompagné tout ce processus c'est une perte de connaissances, de goûts patiemment et richement construits qui a transformé lentement mais sûrement la société en un conglomérat de consommateurs sans histoire, ce qui sert l'intérêt du système industriel: Patrick Le Lay et son temps de cerveau disponible pour Coca-Cola...
trente six seb je suis entièrement d'accord avec toi!
dependancesbois je suis entièrement d'accord avec toi sauf, sur ta façon de qualifier tes propres travaux!
kaj ton analyse très synthétique est parfaitement juste, selon moi. Cela dit, je pense que tout va être renversé avant peu: le capitalisme mondialisé va très probablement se casser la figure un jour ou l'autre, et on reviendra à un temps plus long, une reprise en compte d'échelles plus locales. Il est évidemment un peu vain de jouer au prophète, mais j'ai le sentiment que l'artisanat a de beaux jours devant lui.
gabriel4 Merci Gabriel!
kaj Oui, tu l'as dit! Quel délire...
sylvainlefrancomtois oui, et ces jeunes générations ont un urgent besoin de retrouver le plancher des vaches, et un rapport au réel qui leur permette de construire une véritable estime d'eux-mêmes, loin des fariboles que le discours publicitaire essaie de leur faire rentrer dans la tête.
Kentaro je suis très content pour toi que tu t'en sortes au mieux grâce à tout cela, mais je reste très dubitatif sur le modèle de société qui accompagnerait une généralisation de ce que tu décris, encore basé sur un modèle technoscientifique consumériste qui a montré ses limites nutritives...
Goulipao Merci cher Goulipao pour ta gentillesse!
Bonjour José. Oui, j'ai fait plusieurs récitals sur ses instruments, notamment à Saint-Louis-en-l'Île à Paris et à Saint-Julitte à Saint-Cyr-sur-Loire, qui sont ses deux instruments que j'ai préférés pour ma part. Ses claviers sont souvent plaqués en bois, c'est vrai. Tu as donc une formation de facteur d'orgues?
Cher Gliron, j'entends en lisant ton texte une musique dans laquelle je me reconnais parfaitement. Je crois que nous habitons la même contrée, comme d'ailleurs tant de personnes ici!
Le magnifique quatrain de Silesius que tu cites correspond trait pour trait à la définition parfaite d'un sujet authentique (Je, opposé à "moi"): disponibilité au monde et aux autres, comme dans l'Ancien Testament le "Hineni" - "je suis là" ou "me voici" - des prophètes, à l'opposé du tout-à-l'égo, comme dit Régis Debray, favorisé par la "culture" mainstream, dont il forme une des armes de persuasion les plus efficaces, suivant en cela l'enseignement du grand ancêtre du capitalisme le plus sauvage, Mandeville. (pour ceux que ça pourrait intéresser, voici une remarquable conférence sur la question, donnée par un des philosophes les plus intéressants du moment selon moi, Dany-Robert Dufour:
youtu.be/goYIG9IQv44 )
Ara je trouve que tes remarques sont justes. Je crois qu'il ne s'agit pas de dire que "c'était mieux avant", mais bien plutôt de signaler ce qui ne va pas maintenant pour tenter de l'améliorer. Ce qui s'est déplacé, ou même a disparu, c'est l'horizon symbolique qui avait malgré tout l'insigne avantage de donner un sens à la vie des gens au milieu de toutes les difficultés à traverser - ce qui caractérise à toute époque une vie humaine. Le problème de la nôtre est qu'elle est fondée sur la citation de Madame de Pompadour "après nous le déluge", ce qui est une autre façon de formuler " nous sommes les premiers" ou "avant nous il n'y avait rien". Or la vie est un pont lancé d'un point d'appui ancré dans le passé vers une rive incertaine qui se conquiert par le désir et non par la volonté, ce que notre époque semble oublier. Ce n'est pas sans conséquences dans de nombreux domaines: écologie (les meubles IKEA puis Intériors finissent souvent à la décharge...) pédagogie (état critique de l'EN qui n'est plus à démontrer), psychologie (détresse psychique et psychasthénie chronique des plus jeunes)... et on peut continuer cette liste grise longtemps comme ça. Je crois que nous pouvons avoir plus d'ambition, et il ne faudrait pas gratter bien loin pour trouver mieux!
dependancesbois, d'accord avec toi!
Gliron je suis allé regarder ton parcours, riche, vivant et authentique. Je ne comprends que trop bien ton désir de revenir en deça des mots...
(Au fait: la maladresse n'est pas une fatalité, ce n'est qu'une question d'attention et d'anticipation: tout se travaille, et tu as déjà de très belles réalisations à ton actif!)
Ara Et oui, Ara, j'habite dans un petit village de 600 habitants dépourvu de tout commerce - pas même une boulangerie - à 10 km de la petite ville la plus proche. Me rendre à Paris pour acheter mon matériel est une expédition déraisonnable, surtout depuis les dernières mesures prétendument écologiques prises par l'actuel maire...
Alors comme je sais que les employés Amazon se font sordidement exploiter, je leur donne systématiquement un solide pourboire quand ils viennent frapper à ma porte. Je serais tenté de dire que ne pas avoir recours aux services du net devient presque un luxe de notables...
Gliron, je bois ce que tu dis comme du petit-lait! Le problème du langage est qu'il tend à se désarrimer de son ancrage référentiel, qui ne peut résider qu'au sein d'une conscience pleinement vivante tendue vers le monde et vers les autres. Cette tension et cette vie ne peuvent en aucun cas être enfermées dans quelque livre que ce soit: c'est notre dimension incarnée qui nous donne accès au référent, pendant que notre esprit à tendance à s'envoler loin du réel. Je ne comprends que trop bien ce que tu dis à propos du glissement du rabot sur le bois, et tu as parfaitement raison quand tu assimiles les réalisations des uns et des autres à un discours, car c'en est un!
Bonjour Etienne. Vous avez raison, mais j'ai eu à souffrir d'accueils pour le moins contrastés dans certains milieux qui ne comprenaient et n'acceptaient pas cette diversité d'intérêts: je suis prudent depuis. Mais l'accueil est ici formidable et vous êtes nombreux dans ce cas, ce qui est bien agréable.
ourea je le sais, je l'ai vu et compris rapidement! Je viens d'aller jeter un œil rapide sur la section blog: il faudrait suggérer aux responsables de notre pays d'aller y faire un tour pour voir ce que c'est que diriger vraiment...
José Das Neves Tu as fait un tour de France? Ça doit être une formidable expérience!
Bonsoir ebenober,
Cet instrument appartient à un collectionneur particulier. Il se trouve présentement et provisoirement exposé au musée de Provins et du Provinois.
Mais dis-moi tu as l'air de t'y connaître! Harmoniser est le terme juste pour la dernière opération effectuée sur un orgue avant accord. On ne fait pas cela avec un diapason mais avec un petit marteau, diverses lames, couteaux et tiges, mais là je rentre vraiment dans le détail!
ebenober Ah oui je comprends la situation est atroce en ce moment. En France tous les concerts sont arrêtés ou quasiment, ce qui n'est pas le cas dans d'autres pays européens comme l'Allemagne, où je dois partir bientôt. Quel type de musique chantez-vous?
Non, je ne l'ai jamais joué. Tu qualifies parfaitement le style des buffets de Bernard Aubertin en parlant de "baroque revisité". Sans nier le talent de dessinateur qui est le sien, je suis pour ma part assez réservé sur la portée expressive réelle d'une semblable esthétique... (je peux argumenter longuement sur la question, qui se pose également dans plein d'autres domaines)
trente six seb Le sujet est vaste, mais en gros, une civilisation en pleine santé ne se pose jamais la question du style. Elle répond à des impératifs immédiats liés à la nécessité, ce qui a pour conséquence l'émergence d'un propos (ce qui est dit ou fait), d'une adresse (à qui c'est dit ou pour qui c'est fait) articulés à une fonction (en vue de quoi c'est dit ou fait). Lorsque cette civilisation est en crise et perd de ce fait une part de sa vitalité, parce que, par exemple, son emprise technique sur le monde fait que celui-ci semble ne plus lui offrir aucune résistance, émergent alors des interrogations sur le style résultant d'une dégradation du geste ou du propos en maniérismes. Un exemple: lorsque l'on a voulu vitrer au XVIIème siècle les grandes ouvertures des palais, la technologie du verre n'était pas en mesure de produire de vitres suffisamment grandes pour couvrir la surface entière des ouvrants. Pour palier à ce problème, on a divisé la surface vitrée à l'aide de menuiseries croisillonnées, qui avaient la propriété émergente non concertée à l'origine de rythmer l'espace et le regard porté vers l'extérieur d'une manière très harmonieuse. On obéissait cependant à une simple logique de nécessité: on faisait comme ça parce qu'on ne pouvait pas faire autrement, et le charme qui en résultait était d'autant plus grand qu'il n'était pas recherché. Les fenêtres contemporaines n'ont plus besoin de ces croisillons car on maîtrise à présent la technologie du verre à un point insensé, mais on continue à mettre des "petits bois" (en...laiton, entre les vitres d'un double vitrage ...) parce que ça fait "joli" - ce qui est vrai (mais pas en laiton, en tout cas pour ce qui me concerne)! Et d'ailleurs la poésie attachée à cette division du verre provient en partie du fait qu'elle nous rappelle notre finitude, c'est-à-dire que nous ne pouvons pas tout, justement, et que le réel dans lequel nous sommes inscrits nous a précédés, et, d'une certaine façon, est "plus fort que nous".
L'expressivité réelle d'un propos, quel qu'il soit, résulte selon moi des noces entre la nécessité véritable de ce même propos confrontée à la résistance que le réel exerce contre sa manifestation, et l'élégance avec laquelle on parvient à dominer cette résistance. Quand on peut tout, on ne peut rien, ou en tout cas pas grand chose. Notre civilisation techno-industrielle a réussi à faire taire le réel - en tout cas jusqu'à un certain point qu'elle semble d'ailleurs vouloir ignorer - et c'est pour cela qu'on ne cesse d'être préoccupé par le style depuis le XIXème siècle: faux ceci, faux cela, style baroque, renaissance, etc... Moi-même je fais des sculptures qui se réfèrent explicitement à ces univers, mais c'est pour une autre raison: je me suis battu à bras le corps avec les problèmes spécifiques de mon époque en tant que compositeur, et je viens chercher dans la sculpture un repos que je n'ai jamais eu en composition. Pas question donc pour moi de tenter quelque "geste contemporain" que ce soit dans ce domaine!
Je ne sais pas si je réponds au moins partiellement à ta question, cher trente six seb.
Niouniou je te remercie pour ton gentil commentaire! Pour assurer une sécurité optimale il convient que les avant-bras forment avec le corps un triangle, et que l'outil retenu par une main et poussé par l'autre pointe toujours à l'extérieur de ce triangle. Si on respecte scrupuleusement cette règle il n'y a jamais d'accident.
Gliron J'espère que tu ne t'es pas blessé trop sérieusement.
Magnifique! Bravo Gilles! Je suis en train d'aménager une petite chapelle à gauche de mon portique et j'aurais besoin de lui faire une porte: je m'inspirerai de la tienne qui est splendide.